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lunes, 14 de agosto de 2023

10. 8. Diverses leçons en l' Histoire de la Royne Brunehaud, Gregoire de Tours, S. Gregoire Pape.

Diverses leçons en l' Histoire de la Royne Brunehaud, avecques un sommaire discours de ce qu' on trouve à son advantage, tant dedans Gregoire de Tours, que S. Gregoire Pape.

CHAPITRE VIII.

Apres vous avoir discouru & justifié ce que je pense veritable en l' histoire de Fredegonde, je viens maintenant à celle de Brunehaud: En laquelle je supplie le Lecteur s' armer de patience, jusques à la closture de mon compte, me promettant que pour fin de jeu il y trouvera matiere pour se contenter. Jamais lignee ne fut affligee de telle façon comme celle de Brunehaud par la famille de Fredegonde. Galsonde sa sœur aisnee deuxiesme femme de Chilperic, estranglee dedans son lict, Sigebert son mary assassiné, Childebert fils de luy empoisonné, le tout par les artifices de Fredegonde. Et apres son decez les enfans de Theodoric fils de Childebert occis, & leurs Royaumes empietez par Clotaire fils de Fredegonde; & finalement Brunehaud cruellement mise à mort. Grandes certes, & merveilleuses afflictions: mais cette-cy paravanture non moindre, qu' apres la mort espouventable de cette Princesse, le battu a payé l' amende. Car la plus part des plus anciens Autheurs, qui depuis Gregoire de Tours ont escrit nostre histoire, luy imputent tous les malheurs qui lors, & auparavant estoient advenus en la France, & la publient pour la plus furieuse Megere, qu' oncques comparut sur la face de la terre. Ce que j' oze attribuer, non tant à la verité de l' histoire, qu' au bon-heur du Roy Clotaire son ennemy, pour excuser l' inhumanité barbaresque dont il la traicta à sa mort. Et qui est encore plus esmerveillable, c' est que si cette Royne fut cause pendant sa vie de plusieurs guerres, & divisions entre les Roys Theodebert & Theodoric ses petits enfans, ainsi que le porte la commune leçon, elle n' excita pas moins de partialitez entre ceux qui escrivirent sa vie. Uns Fredegaire, Aimoïn, Gaguin & Gilles, du tout voüez à mesdire d' elle: Au contraire nostre gentil Paule Aemile, & du Tillet Evesque de Meaux à l' excuser, & soustenir que la plus part de ce que les anciens en avoient mesdit estoit faux. Il n' est pas qu' entre ceux qui de plus fraische memoire ont mis la main à la plume, il n' y ait pareilles partialitez. Car Pierre Masson, qui par un nom emprunté de Tite Live, s' est appellé Papirius Massonius, & apres luy Jean Mariana Espagnol sont formellement pour le dernier party: Contre lesquels Haillan, Veignier, Belle-forest, Serre & Fauchet sont pour le premier. Je donne cet ordre à ces cinq, non sur le poids de leurs merites; ains selon qu' ils mirent leurs œuvres en lumiere: Quant à moy sans m' arrester à ceux-cy, desquels toutesfois j' entens parler avecques tout honneur, je me delibere de deduire par ce Chapitre, tout ce que j' ay trouvé de bon & mal d' elle dedans deux Autheurs qui sont sans reproche, pour avoir vescu pendant la vie de cette Princesse.

Le premier que je voy en avoir parlé est Gregoire Evesque de Tours, quand il dit que Sigebert Roy d' Austrasie, plus sage que ses trois autres freres qui s' adonnoient à amours lubriques, rechercha en mariage Brunehaud fille d' Athanaïlde Roy d' Espagne. Erat enim puella elegans opere, venusta aspectu, honesta moribus, atque decora, prudens consilio, & blanda colloquio. Car elle estoit (fait-il) accompagnee d' une bien-seance en ses actions, belle à qui la regardoit, bien morigenee, sage en ses conseils, & d' un doux entregent. Cela mesme est confirmé par Fortunat Evesque de Poictiers l' un des premiers Poëtes de son temps, quand au 6. livre de sa Poësie parlant d' elle il dit.

Pulchra, modesta, decens, solers & grata, benigna, 

Ingenio, vultu, nobilitate potens.

Et ayant esté cette Princesse de cette façon depeinte par Gregoire, il dit que apres avoir esté catechisee, & espousé la Religion Catholique, au lieu de l' Arrienne en laquelle elle avoit esté nourrie en Espagne chez son pere, le Roy Sigebert tout d' une suite l' espousa. Et tant & si longuement que ce Roy vesquit, je ne voy dedans Gregoire, qu' il soit parlé en bien ou en mal d' elle. Qui ne luy est pas un petit honneur: Car à bien dire la femme n' est peu honoree, qui sans mettre ses deportemens à l' essor, reduit toutes ses volontez à la volonté de son mary. Soudain apres le decez de luy, je la voy mise sur les rangs en deux actes: L' un quand advertie de cette mort inopinee, elle fait sortir de nuict à petit bruit sur les murailles de la ville dedans une corbeille, Childebert son fils; lequel par l' entremise du Capitaine Gondebaud, fut conduit à Mets, & couronné Roy d' Austrasie, aagé seulement de cinq ans: L' autre quand Chilperic insolent en sa bonne fortune, advenuë de l' assassinat commis en la personne de Sigebert, confina cette Princesse en la ville de Rouen, pour y terminer ses jours; où elle espousa quelque peu apres Meroüee, fils aisné de Chilperic. Le premier fut un acte de bonne & sage mere: Le second fut conduit par deux ames aveuglees de passions, l' une de l' amour en Meroüee, l' autre de la vangeance en Brunehaud. Car si ce mariage luy eust reüssi suivant son souhait, c' eust esté un admirable traict de vangeance digne d' estre trompeté dedans une longue posterité, se vangeant de la mort de son mary, par le fils contre le pere son ennemy. Mais il y eut tres-grande faute de prudence: D' autant que le lieu où le mariage se fit estoit sujet au Roy victorieux, & le peu de gens de main qu' ils avoient pour leur faire espaule, les devoit destourner de cette entreprise, comme l' evenement leur monstra. Que s' ils l' eussent differee jusques à ce que cette Princesse eust esté restablie en sa ville de Mets, comme elle fut depuis, croyez qu' elle eust taillé prou de besongne à son ennemy. Ce que je vous dis je le tiens en foy & hommage de Gregoire de Tours, qui ne m' est pas un petit parrein, cela estant avenu de son temps. Et neantmoins ne pensez qu' il l' ait espargnee, quand l' occasion s' y est presentee. Qu' ainsi ne soit le Roy Gontran ayant avecques grande ceremonie adopté le Roy Childebert son nepueu, il luy conseilla avant que partir, de ne se fier à la Royne Brunehaud sa mere, comme celle qu' il sçavoit avoir quelques sourdes intelligences avecques Gondebaud son ennemy capital, lequel sous ombre d' une longue chevelure, qu' il ajençoit à la Royale, se maintenoit estre fils du Roy Clotaire premier. C' estoit l' opinion que Gontran avoit lors, vraye ou non, c' est la question: mais il y avoit bien grande apparence du non; n' estant pas à presumer qu' une mere eust voulu favoriser celuy qui luy estoit incogneu, au desavantage de son fils. Joint que je la voy sur ce mesme subject avoir esté depuis calomniee. Car Gondebaut ayant esté mis à mort en la ville de Comminge, on fit depuis entendre à Gontran que Brunehaud avoit fait depuis forger un bouclier d' or massif, enrichy de plusieurs pierres precieuses, pour le donner au fils de Gondebaut. Chose qui mit Gontran en cervelle, & sur ce rapport envoya guettes de toutes parts; mais il trouva en fin de compte, que ce bouclier estoit destiné pour le Roy d' Espagne qui attouchoit Brunehaud de proximité de lignage. Et de fait nonobstant ces pretendus soupçons, elle eut tousjours bonne part aux affaires du Roy Childebert son fils. Elle intervient au traicté de reconciliation qui fut fait entre les deux Roys, & y est establie sous ce titre de Gloriosißima Regina, que je veux rendre en nostre langue Françoise: Tres-grande, & tres-haute Royne: & par le discours du traicté, entre autres particularitez il est dit, qu' advenant que Childebert allast le premier de vie à trespas Gontran prenoit à sa protection Brunehaud mere, Fallenbe femme, & ses enfans. Gilles Evesque de Rheims est degradé des Ordres de Prestrise, privé de son Evesché, & banny, pour avoir conspiré contre la vie de Brunehaud. Bref je ne voy aucun passage en Gregoire de Tours, par lequel il ait grandement suggillé l' honneur & reputation d' elle, depuis son mariage fait avecques Sigebert l' annee 565. jusques au decez de Gontran l' an 597. qui disent trente deux ans. Et depuis ce temps vous trouverez une amitié contractee de sa part avecques sainct Gregoire Pape, qui dura jusques en l' an 604. que ce grand Prelat rendit l' ame à Dieu. Nous voyons seize lettres de luy dedans son Registre (ainsi appelle l' on le livre) diversement esparses à Brunehaud, Childebert, & à ses enfans: mais principalement à la mere.

Or l' air general de toutes ces lettres estoit de haut loüer premierement la pieté de la mere envers Dieu, puis sa sagesse en la conduite de ses enfans, & à eux l' obeïssance filiale qu' ils rendoient à leur mere. Et presque en toutes il les prie de bannir de leurs Royaumes la symonie qui n' estoit que trop familiere aux Eveschez, & de ne permettre que les hommes Laiz, de plein faut, fussent faicts Evesques, sans avoir prealablement passé bien & deüement par les Ordres de Prestrise: Qui estoit en bon langage frapper au mesme lieu où estoit leur mal. Car nos Roys adoncques se donnoient en telles matieres plein ban: tolerans à veüe d' œil la symonie aux Eveschez, voire y ayans quelquesfois part: Et au surplus les conferoient selon leurs grez, le plus du temps à gens Laiz & illetrez, lesquels selon la corruption du siecle prenoient du jour au lendemain les Ordres de Prestrise, & tout aussi tost chargeoient la Mytre & la Crosse d' Evesques. Puisque ce grand sainct homme loüant cette Royne & ses enfans, leur impropera tout franchement les deux fautes que l' on commettoit aux Eglises de leurs Royaumes, je ne me puis faire accroire qu' il eust passé par connivence les vices, que l' on a depuis imputez, avecques une grande largesse à la mere.

Par tout ce que je vous ay cy-dessus discouru, depuis l' an 565. mariage de Brunehaud, jusques en l' an 604. mort de sainct Gregoire, je voy en cette Histoire deux Gregoires: chacun en son endroict grand Prelat, l' un Evesque, l' autre Pape, tous deux canonizez par l' Eglise. Celuy là n' avoit grandement nauré l' honneur de ceste Dame, lequel finit son Histoire de nos Roys au baptesme du Roy Clotaire second qui fut fait l' an cinq cens nonante cinq. Cestuy cy l' avoir celebree comme Princesse sans pair, en matiere de devotion, dont les Eglises par elle basties au Royaume de Bourgongne servoient de bons tiltres & enseignemens. Mais sur tout nulle tache de cruauté remarquee par ces deux Prelats en cette Princesse.

Cela est cause que Papirius Massonius en son Histoire de la France, soustient qu' il falloit, ou que cette Princesse eust esté pleine de grande pieté, ou sainct Gregoire d' impieté, de nous l' avoir par ses lettres pleuvie autre qu' elle n' estoit. Au contraire le docte Cardinal Baronius dict, (sans toutes-fois le nommer: mais on voit bien que c' est luy auquel s' adresse ce pacquet) qu' il se mocquoit de cette opinion: comme s' il n' eust peu advenir que depuis le decez de ce grand Gregoire elle fust depuis tombee en sens reprouvé, & qu' il eust esté garend des fautes par elle du depuis commises. Paroles par lesquelles il recognoist taisiblement qu' il ne la falloit rechercher du passé. Quant à moy tout ainsi que je ne la veux totalement excuser; aussi ne la puis-je totalement accuser. Le tout ainsi que vous pourrez entendre par les particularitez que je discourray cy-apres.

lunes, 22 de mayo de 2023

CHAPITRE XIII. Du pays de Gascongne & du Languedoc.

Du pays de Gascongne & du Languedoc

CHAPITRE XIII. 

Ce lieu paraventure requiert, apres avoir fait mention de quelques autres nations, qui butinerent les Gaules, parler semblablement des Gascons, peuples certainement incogneuz à noz vieux Gaulois, lors mesmement qu' ils sentirent le desbord de tant de peuples estrangers. Et à vray dire, malaisemment que l' on puisse bien descouvrir en quel temps ils planterent leur demeure en Aquitaine, pour être leur venuë presque oubliee, ou par l' injure des ans, ou par le nonchaloir de noz ancestres. En quoy mesmement quelques autheurs varient, d' autant que les aucuns (comme Blonde) ne recognoissent les Gascons, sinon d' autant qu' ils estiment qu' ils fussent issuz des Visegots, qui pour quelque temps occuperent l' Aquitaine: voulans dire que de Visegot, se feit à la longue le mot de Visgot, puis de Vascon, que nous avons dict en nostre langue Gascon. Tous de la mesme façon que nous voyons qu' il n' est pas hors de propos, d' estimer le pays de Languedoc être ainsi appellé, quasi comme langue de Got, pour autant que premierement les Visegots, puis apres les Ostrogots y feirent assez longue demeure, ainsi que j' ay deduit autrepart. Quant à moy je ne fais aucune doubte que le pays de Languedoc n' ait esté dit par une transposition & alteration de parole quasi Langue de Got: encore que je sçache bien que l' erreur commune soit telle que l' on estime que ce pays soit ainsi nommé de ceste diction Oc, qui signifie entr' eux Ouy, pour laquelle cause quelques ignorans diviserent autrefois la France en Langue d' oc & Langue d' ouy, comme voulans dire que les uns prononcent Oc, les autres Ouy. Mais c' est chose grandement ridicule d' estimer que par ces deux dictions affirmatives l' on ait voulu diviser toute ceste France. Parquoy la verité est comme j' ay dit que Languedoc a esté ainsi appellé par une corruption de langage à cause de la langue de Goth qui s' estoit insinuee plus familierement en ceste contree que en toute autre, pour la domination qu' illecq' avoit eu le Goth. Et de fait lisez tous les anciens autheurs de la France parlans de ce pays en Latin, ils l' appellent linguam Gotticam. Toutesfois tout ainsi que pour le regard du Languedoc, je suis d' advis qu' il a emprunté son nom des Gots, aussi n' accorderay-je tout au contraire à Blonde, que le Gascon ait pris sa derivation de Visegot, d' autant que long temps auparavant que le nom de Visegot fut en usage, celuy de Gascon estoit cogneu. Car de luy faict mention Tacite au 20. de ses Annales, & Lampride en la vie de l' Empereur Alexandre. Et d' eux parle le Poëte Silic Italien, lors qu' il dit qu' ils n' estoient coustumiers marchans en bataille de porter armes en teste. Et Lampride les pleuuit avoir esté grandement expers & entendus en ces supestitieuses divinations que les Ethniques tiroient des oyseaux. Et à ce que l' on peut recueillir de l' ancienneté, le Gascon feut un peuple demeurant dans le Pirené aux confins & frontieres de l' Espaigne, non grandement eslongné de l' Aquitaine, qui fut cause que plus aisemment il gaigna pied celle part, comme nous pouvons mesmes nous rendre certains de ces vers que Paulin escrivoit à Ausone. 

--- Quid tu mihi vastos, 

Vasconia saltus, & ninguida Pyrenaei

*Objcis hospitia? in primo quasi limite fixus, 

Hispaniae regionis agam. 

De rapporter seurement au vray poinct le temps de leur premiere arrivee, combien que ce soit chose mal aisee, comme maintenant je disois, toutesfois à mon jugement ce peut être vers le regne du Roy Chilperic, ou peu apres ? d' autant qu' auparavant noz autheurs n' en faisans aucune mention, commencerent de là en avant à les mettre assez souvent sur les rangs. Mesmes qu' il semble que Gregoire de Tours nous en baille quelque advertissement au septiesme chapitre du neufiesme de ses Histoires, quand il dict, que peu apres la mort de Chilperic, du temps que Gontran son frere tenoit une bonne partie de la France, bien qu' il ne s' intitulast que Roy d' Orleans, descendirent les Gascons des montaignes au plat pays, degastans les champs labourables & vignes, bruslans maisons & villages, & ensemble menans quant & eux une infinité de pauvres captifs avec leur bestial: contre lesquels se presenta assez souvent Austrovault Duc & gouverneur d' Aquitaine, combien qu' il y feist assez mal ses besongnes. Depuis ce temps là ils s' empieterent du pays, qui est aujourd'huy de leur nom: ne recognoissans autre seigneur que de leur nation, jusqu' à ce qu' environ quarante ans apres ils furent deffaits par Dagobert, & reduits en forme de Province. En laquelle maniere ils durerent longuement sans grandes revoltes, excepté vers le temps de Charles Martel. Car tout ainsi que Martel entreprenoit toute puissance & authorité sur le Royaume, aussi à son exemple en voulurent faire autant en leur endroit plusieurs Ducs. En maniere que Martel, qui representoit soubz son Estat de Maire du Palais la personne du Roy, se trouva avoir plusieurs grandes *contre Eude Duc d' Aquitaine, aidé en ses entreprises du Duc de Gascongne. Vers lequel mesmement Gaïfer & Hunault enfans d' Eude (desheritez du temps de Charlemaigne du pays qu' ils affectoient) se retirerent, ausquels il donna pour quelque temps assez grand confort & aide: tant que finalement soubz nostre Debonnaire, Loup Duc de Gascongne fut pris, & par l' advis des Barons de France confiné en perpetuel exil. En cestuy finirent les Ducs de Gascongne: car depuis noz Rois, ayans reüny tous ces païs d' Eude, & de Loup soubz leur puissance, comprindrent de là en avant le pays de Gascongne soubz le gouvernement d' Aquitaine.