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martes, 27 de junio de 2023

4. 14. D' où vient que l' on a estimé les Greffes, & Tabellionnez estre du Domaine du Roy,

D' où vient que l' on a estimé les Greffes, & Tabellionnez estre du Domaine du Roy, ensemble sommaire discours sur les Notaires, & Clercs des Greffes.

CHAPITRE XIV.

De tous les Estats de la France, ceux-cy sont particulierement estimez domaniaux à nos Roys, & non point du regne de Henry troisiesme dernier mort seulement, sous lequel pour faire deniers ils furent alienez: Mais dés le temps mesmes de Philippes le Long, par son Ordonnance de l' an mil trois cens dix-neuf, dans laquelle y avoit article expres portant ces mots: Et est à entendre que les sceaux, & escritures sont de nostre Domaine: & Et plus bas: Item tous sceaux, & escritures seront vendus d' oresnavant par encheres a bonnes gens & convenables: Mais d' où vient que tous les autres offices sont mis entre les parties casuelles, & ceux cy particulierement reputez domaniaux? Cela procede d' une ancienneté, qui prend ses racines de l' Empire de Rome, sous lequel tous ceux qui estoient serfs, & gens de mainmorte condition estoient par nous possedez, tout ainsi que toute autre chose qui estoit de nostre Domaine. De maniere qu' ils pouvoient estre par nous vendus, & alienez. Or est-il qu' entre les serfs il y en eut une espece de publics, c' est à dire de gens qui estoient destinez pour le service des villes: Dont les aucuns furent Greffiers destinez à recevoir es appointemens & sentences des Juges des lieux, & les autres Tabellions, pour recevoir les contracts qui se faisoient entre les parties. Pour le regard des Greffiers, nous l' apprenons de Jules Capitolin en la vie de l' Empereur Gordian, parlant d' un Arrest du Senat de Rome, qui avoit esté receu par la main d' un Senateur, & non d' un Greffier, a fin qu' il ne fust divulgué, lequel pour cette cause appelle il, Senatusconsultum tacitum. Non scribae (dit-il) non servi publici, non censuales exceperunt. Et c' est la cause pour laquelle AEmilius Probus en la vie d' Eumenes disoit. Scribae munus apud Graios fuiße honorificentius, quam apud Romanos. Nam apud nos sicut sunt, mercenarii existimantur, & apud illos contra, nemo ad id officium admittitur, nisi honesto loco, fide, & industria requisita. Quod necesse est eum omnium Consiliorum esse participem. Et les premiers qui entre les Empereurs de Rome les voulurent affranchir, furent Arcade, & Honore en la loy unique, De scribis & holographis, au Code Theodosian. Ils estoient par les anciens appellez Scribae, Censuales, Logographi, Holographi, mais le mot plus familier estoit celuy de Scriba. Vopisque en la vie de l' Empereur Probus se vante avoir recueilly une partie de son Histoire, Ex regestis Scribarum, c' est à dire des Registres du Greffe: Et de là vient qu' encores és jurisdictions Ecclesiastiques nous appellons Scribe celuy, qui est le Greffier, que nous avons entre nous appellé du mot Grec.

Au demeurant tout ainsi que les Greffiers, aussi estoient les Tabellions, serfs publics. Et de faict, le tiltre du Code Theodosian conjoint les Tabellions avec les Scribes, & Greffiers. Et cela a produit une coustume, dont plusieurs ignorent la raison. De disposition ordinaire du droict des Romains, nul ne pouvoit stipuler que pour soy-mesme. Regle qui recevoit une particuliere exception, par ce que les serfs, qui estoient de nostre Domaine pouvoient stipuler pour nous. En France nous voyons que les Notaires qui sont les Ministres des Tabellions, stipulent pour nous, encores que nous soyons absens. Parce que les Tabellions estoient reputez serfs publics, & par consequent pouvoient diversement stipuler pour chacun selon les occurrences des affaires. Quand les François s' impatroniserent des Gaules subjectes auparavant de l' Empire, ils ne trouverent point alors, comme il est grandement vray-semblable, ces Greffiers & Tabellions afranchis: Et y a grande apparence que l' ordonnance d' Arcade, & Honore fut introduite pour les villes de Rome, & Constantinople, où ils avoient toute puissance, & non pour prejudicier aux villes, qui particulierement avoient telles sortes de serfs publics. Au moyen dequoy nos Roys ayans transporté en eux tout ce qui estoit de l' authorité publique des villes, ils estimerent les Greffes, & Tabellionnez estre de leur vray estoc & Domaine. Chose que l' on a tousjours estimé, encores que par succession de temps ils ayent esté exercez par gens de franche condition. Cecy se doit nommément entendre pour les Greffes des Jurisdictions ordinaires qui sont les Prevostez, Vigueries, & Vicomtez, & non pour les Greffes des Bailliages, Seneschaussees, ou Elections, & moins encores des Cours souveraines: Qui sont Ordres que la necessité des affaires a depuis introduits en la France, comme pareillement leurs Greffiers, lesquels ne furent jamais mis au nombre des serfs, ny par consequent ne doivent estre reputez domaniaux. Certes celuy qui pour advantager ses affaires, les fit exposer en vente par le feu Roy Henry III. comme domaniaux, meriteroit, s' il vivoit, qu' on luy fist son procez extraordinaire, a fin de servir d' exemple à la posterité. Car je vous puis dire que sur la vente de ces Greffes fut entee la ruine de nostre Estat. Mais pour reprendre le fil du present chapitre, & que l' on cognoisse aussi dont sont provenus les Notaires qui sont ceux qui reçoivent aujourd'huy les minutes des contracts, lesquels sont puis apres grossoyez par les Tabellions, a fin d' estre mis à execution par le moyen du seel qui est par eux apposé. La verité est que ces Tabellions ne pouvans seuls fournir aux affaires, furent contraincts de prendre gens en leurs maisons pour les seconder: Tout ainsi que les Greffiers avoient aussi gens qui escrivoient sous eux, lesquels faisoient part & portion de leurs familles, & qui demeuroient avecques eux. Ceux qui demeuroient avecques les Tabellions, furent à la longue appellez Notaires. Les autres qui avecques les Greffiers furent appellez Clercs, mots de mesme signification pour ceux qui sçavent manier la plume. Et de là vient que nos anciens en cas toutesfois plus auguste appelloient les Secretaires de nos Roys, Clercs, & Notaires, comme ceux qui faisoient seulement profession d' escrire dessous leur authorité. Les Notaires premierement se desmembrerent d' avecques leurs maistres, choisissans des demeures particulieres, & depuis par successions de temps on les erigea en estats pour recevoir les notes, & minutes des contracts. Cette separation n' advint pas si tost aux Greffiers. Car sans aller chercher exemple plus loingtain, sous le regne de François premier, tous les Clercs de Maistre Helie du Tillet Greffier Civil du Parlement de Paris, se tenoient encores chez luy, il couchoit, nourrissoit, chauffoit, le tout en la mesme façon que l' on voit les Clercs des Advocats, & Procureurs. Le Premier Greffier du Parlement, sous lequel se changea cette ancienne coustume, fut Maistre Jean du Tillet, par ce que ses Clercs s' habituerent en autres maisons que la sienne, & se marierent. Vray que tout ainsi que leurs predecesseurs en leurs maisons ordonnaient des charges diverses de leurs Clercs: aussi fit cettuy le semblable, combien qu' ils ne demeurassent chez luy, jusques à cette grande desbauche des Greffes, qui advint sous le regne du Roy Henry troisiesme, quand il les erigea en Offices, tout ainsi comme auparavant avoient esté les Notaires. Et de la vente d' iceux en fit un present à la Royne Catherine de Medicis sa mere.

jueves, 22 de junio de 2023

3. 33. Du profit & emolument des Regales qui appartient aujourd'huy aux Tresorier & Chanoines de la saincte Chappelle de Paris.

Du profit & emolument des Regales qui appartient aujourd'huy aux Tresorier & Chanoines de la saincte Chappelle de Paris

CHAPITRE XXXIII.

Il ne faut point faire de doute qu' anciennement les fruicts qui provenoient des Eveschez vaquans en Regale estoient estimez, purs Domaniaux. C' est pourquoy par une vieille Ordonnance du premier jour de Mars 1388. il fut expressément ordonné que les deniers qui se recevroient des Regales par les Receveurs particuliers du Domaine, seroient par eux baillez au Changeur du Tresor, qui estoit comme j' ay dit ailleurs, Receveur general du Domaine par toute la France. Et par autre de Charles VI. du 28. de May 1417. il voulut que toutes & quantes fois que les Regales seroient ouvertes, elles fussent gouvernees tant en jurisdiction que recepte: C' est à sçavoir en Jurisdiction ordinaire par les Baillifs, & Seneschaux, & le fait des eauës & forests, par les Maistres des eauës & forests: & les receptes par les Receveurs ordinaires des lieux, esquels s' estendroit la Regale, & defenses faites d' y commettre autres Receveurs par Commission.

La Saincte Chappelle de Paris fut bastie par le Roy sainct Louys, d' une architecture admirable telle que nous pouvons voir. J' ay autrefois ouy dire à Maistre Jacques Androuet, dit du Cerceau, l' un des plus grands architectes qui se soient jamais trouvez en la France, qu' entre tous les bastimens faicts à la moderne, il n' y en avoit point de plus hardy que celuy-là. Appellant bastiments à la moderne comme une Eglise Nostre Dame de Paris & autres tels, qui sur nouveaux desseins furent introduicts depuis le declin de l' Empire de Rome n' ayants riens emprunté de toutes ces parades qui estoient auparavant, telles que celles dont depuis le sieur de Claigny voulut embellir le Louvre, sejour ordinaire de nos Roys dedans la ville de Paris. Or outre ceste architecture je souhaitte que l' on considere les vitres de ce lieu, qui furent faites de telle façon, que les vitriers tiennent pour certain que l' usage & manufacture d' icelles en a esté depuis perdu. Cela soit par moy dit en passant. Long temps apres que S. Louys eust basty ceste Chapelle elle fut depuis grandement annoblie par Charles V. C' est luy qui obtint du S. Siege permission au Tresorier d' icelle d' user de mitre, anneaux & autres ornements pontificaux (excepté de la crosse) & donner benediction tout ainsi qu' un Evesque, celebrant le service divin dedans le pourprix de ceste saincte Chapelle.

Or luy mesmes par lettres du 10. Novembre 1364. ordonna que tous les restes des Comptes seroient destinez pour les reparations tant du Palais que de la saincte Chapelle, commandant par expres que ceste Ordonnance fust enregistree en la Chambre des Comptes, & qu' elle ne peut être enfrainte en quelque terme de paroles qu' il decernast lettres à ce contraires. Or comme ceste saincte Chapelle est vrayement Royalle (Royale) de fondation, aussi nos Rois la voulurent par succession de temps honorer des fruits & emoluments des Regales. Le premier qui l' en gratifia fut Charles VII. non à perpetuité, ains pour trois ans seulement: lesquels estants expirez, il les continua à autres trois ans, par ses patentes du premier de Mars 1452. Le tout pour être employez moytié pour le service divin, & l' autre moytié pour l' entretenement des bastiments & edifices. Et par autres subsequentes du 18. Avril 1458. il leur continua cest octroy pour quatre ans, portants les lettres que le revenu fust receu par ses Receveurs ordinaires plus proches des lieux ou escherroient les Regales, & par eux baillez au Changeur du Tresor, pour être par luy convertis à la refection & reparation des ornements & vestemens de la saincte Chapelle du Palais de Paris, ainsi qu' il seroit par les Seigneurs des Comptes ordonné. Louys XI. soudain apres le decés de son pere, voulant passer outre, par ses lettres du 13. Septembre 1465. leur accorda tant qu' il viuroit le profit des Regales, pour employer la moytié à la continuation du service divin, & l' autre moytié à l' entretenement des ornements, vestements & *linge de l' Eglise, & pour soustenir les vitres d' icelle. Ces lettres presentees à la Chambre elle ne les voulut verifier tout à fait, ains les restraignit à neuf ans, par son Arrest du 6. Novembre 1465. Depuis ce temps on ne fit doute de leur accorder cest octroy, à la vie de chaque Roy: Et de fait quasi par un vœu solemnel tous les successeurs de Louys XI. à leurs avenements octroyerent tous ces proficts tant qu' ils viuroient, & ne fit on doubte à la Chambre d' en verifier les lettres. Charles VIII. par ses patentes du quatriesme Decembre 1483. Louys XII. le second an de son regne le 12. De Juillet 1498. François premier le 18. de Mars 1514. Henry son fils le 2. de Novembre 1547. Jusques à ce que Charles IX. par son Edict de Moulins vingtiesme Fevrier 1565. ordonna que de là en avant tous ces fruicts appartiendroient à perpetuité à la saincte Chapelle. Toutes ces lettres bien & deuëment verifiees en la Chambre des Comptes de Paris: Comme celle qui de tout temps & ancienneté a eu la charge du menage de ce temporel, tout ainsi que le Parlement la cognoissance des differents qui se presentoient pour les Benefices vacquants en Regale. C' est elle qui fait saisir le temporel de l' Evesché vacquant en Regale, elle seule qui en donne main-levee le serment de fidelité fait au Roy par le nouvel Evesque, & qui s' en fait rendre compte pour la conservation des droicts de la Couronne. Il se trouve unes lettres du Roy Philippe le Long du I. Octobre enregistree aux Comptes le XXIX. Octobre 1321. dont l' intitulation est telle, Philippus Dei gratia Francorum & Navarra Rex dilectis & fidelibus nostris gentibus computorum Parisiensium, custodibus Regaliarum nostrarum salutem & dilectionem. Là où il leur mande de bailler main levee à l' Evesque de Paris de son temporel: Parce qu' il avoit esté par luy receu en foy & hommage. Depuis que nos Roys eurent tourné en coustume de donner tant qu' ils regnoient aux Tresorier, Chanoines & Chapitre de la saincte Chapelle les fruicts des Eveschez vacquants en Regale, La Chambre par son Arrest du 12. de Mars 1529. ordonna que les commissions qui seroient de là en avant par elle decernees pour saisir le revenu des Eveschez vacquants en Regale, seroient mises és mains des Tresorier & Chanoines de la saincte Chapelle pour les faire mettre à execution sous le nom du Procureur General de la Chambre: Et ainsi s' est tousjours manié ce mesnage, tellement que combien que la poursuite s' en face à leur diligence, si n' en peuvent-ils accorder la main-levee, ny mesmes chevir & composer par transaction, des fruicts qui leurs appartiennent, sans l' authorité de la Chambre.