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miércoles, 16 de agosto de 2023

POUR PARLER DE LA LOY.

POUR PARLER DE LA LOY.

En ce Dialogue l' Autheur entend detester plusieurs esprits libertins, qui se donnent tous discours en bute, monstrant combien il est chatoüilleux de donner loy & permission à chacun de disputer de la Loy generale, sous laquelle il est appellé: Et en passant, descouvre la calamité d' un malheureux siecle, auquel le bon endure aussi bien que le mauvais, sous un pretexte mal emprunté de la Justice.


PREMIER FORÇAT. LE COMITE.

SECOND FORÇAT.


Seigneur Comite pour Dieu mercy, & ne vueille exercer en mon endroict toutes sortes d' indignitez, mais si en toy a (comme en toute personne vivante) quelque marque d' humanité, de grace que la qualité & estat de ma personne te flechisse. 

COMITE. Et qui est donc ce causeur qui publie ses qualitez?

I. FORÇAT. En premier lieu, Seigneur Comite, entens que je ne suis point né Barbare, mais extraict de cette florissante nation d' Italie, davantage que mon influence choisit pour lieu de ma nativité, cette brave ville de Rome, jadis chef de tout l' Univers, & ores Siege des SS. Peres. En toutes ces deux parties heureux certes & trop heureux, si, contant de ma premiere fortune, & guidé simplement par mes instructions maternelles, je n' eusse voulu penetrer és secrets de la Philosophie. Ainsi te peux tu bien vanter d' avoir icy à ta cadene, non seulement un Italien, mais un Romain, & encore un Romain Philosophe.

COMITE. Vray Dieu quel fantosme est-ce cy! comment se pourroit-il bien faire qu' entre tant de pendarts, j' eusse non seulement icy un Philosophe pendart? Car d' Italiens & Romains, ce ne m' est point nouveauté d' en avoir veu par leurs delicts, arriver à mesme condition que celle où tu és à present, mais oncques autre Philosophe que toy je ne vey estre exposé à la rame. Aussi avois-je tousjours entendu que cette Philosophie, laquelle je cognois seulement de nom, estoit un guidon de tout heur, sans lequel nous ne participions en rien de l' homme, fors de l' exterieur de la face. Tellement que maintesfois avec un regret du passé, je detestois ma fortune, & l' injustice de ceux qui eurent la premiere charge de moy: lesquels, comme jaloux & envieux de mon bien, me destournerent si tost des livres, à peine les ayant goustez.

I. FORÇAT. Je ne sçay pas si les livres t' eussent apporté ce bien que tu estimes: parce que tu ne fusses pas tant arrivé à ce point de Philosophie, dont tu parle par leur lecture, que par un assiduel pour-pensement & rapport en ton esprit de toutes choses, qui d' une suite & liaison se tirent de l' une à l' autre. Au reste je te prie que de cette heure, te faisant par mon malheur mieux advisé, tu n' impropere plus à tes parens l' opinion qu' ils eurent de t' entremettre à negotiation, peut estre de plus grand poids que ces vains & inutiles discours, desquels est seulement venu tout le motif de mon mal.

COMITE. Tu palieras les matieres en telle sorte que tu voudras, si ne me sçavroit-il passer devant les yeux, que de cette Philosophie, ains que plustost de ton forfaict ne soit advenu le malheur qu' il faut maintenant que tu boives.

I. FORÇAT. Seigneur Comite, tous tant de Forçats dont tu as icy le chastiment, ont delinqué chacun en leur endroit, sans aucun discours de raison, semonds seulement à mal faire d' une malignité d' esprit: mais s' il te plaist que je te file de point en point, & raconte par le menu l' occasion de mes Galeres, tu entendras que non point par un lasche cœur (ja ne plaise à celuy qui tient l' escrin de mes pensees que j' encoure jamais telle reproche) mais que par un certain jugement je suis tombé en l' erreur dont il faut que malheureusement à cette heure je souffre la punition.

COMITE. Et bien je suis tres-content, pendant qu' il ne fait temporal, & que nous sommes icy à l' anchre en ce lieu de seurté & repos, te donner audience pour quelque temps: mais premier que de t' avancer, pour quelle desconvenuë fus tu amené en ce lieu?

I. FORÇAT. Pour plusieurs occasions, qui sonnent mal envers vous, comme font meurtres, paillardises, larcins, & autres choses que selon vos loix ordinaires, vous appellez fautes & malversations.

COMITE. En bonne foy tu me payes icy en chansons, & faut bien dire que ta profession soit contrevenante à ta parole. Car qui fut oncques le Philosophe qui fit mestier & marchandise de telles denrees, fors que toy? Et si je suis bien recors, j' ay quelquesfois appris, que les plus sages, desquels tu te vantes emprunter le nom, s' esloignoient autant de femmes, argent, & autres telles piperies, qui esmeuvent nos passions, comme aujourd'huy nous y sommes enclins & subjets.

I. FORÇAT. Tu t' abuses Seigneur Comite, & ne faut point en cecy faire une generalité, d' autant que si on veit quelquesfois un Xenocrate morne & pensif, avoir eu une femme à l' abandon sans luy toucher, je luy mettray en contrecarre, un Aristipe, non moindre que luy en renom, publiant entre ses plus notables rencontres, qu' il ressembloit le Soleil, lequel sans se soüiller, esplanissoit ses rayons dans les esgousts, & escluses: & luy du semblable sans alteration de son bon sens ou esprit, alloit & frequentoit les bordeaux. Semblablement si vous eustes un Diogene folastre, vilipendant les deniers, de son mesme temps en contr' eschange ce grand personnage Platon hantoit les Cours des grands Seigneurs, sous tel espoir de profit qu' il se proposoit en tirer: Et pour te dire en peu de paroles, tous les Philosophes anciens furent hommes, consequemment attrempans, ou pour mieux dire hypocrisans & desguisans leurs passions, selon qu' ils estoient plus discrets: mais qu' ils s' en trouvassent aucuns impassibles, ce sont certes illusions & abus, dont ils s' entretenoient en credit envers le simple populaire, sous l' escorce de leur beau parler. Au demeurant quand tous ceux-là dont tu parles eussent esté tels que tu dis, ne pense point Seigneur Comite, que jamais j' asservisse mon esprit dessous les preceptes d' autruy, ains tant qu' une liberté & franchise a peu voguer dedans moy, tant me suis-je consacré à une Philosophie. Que si par fois, par une taisible rencontre de jugemens & humeurs, je me suis trouvé simbolisant en opinion avecques autres, fais moy de grace ce bien de croire, que non par une vaine authorité de mes ancestres, je me sois mis de leur party à cause de leur primauté, mais seulement pour autant que tel ou tel fut mon advis, aidé de quelques raisons qu' un long discours m' avoit apportees: Et pour ce ne me mets point sur les rangs quels ayent esté mes ancestres. Suffise toy, puis qu' il te plaist en ma faveur desrober une heure à tes plus urgentes affaires, que dés que j' eus cognoissance des choses, je projettay de n' endurer jamais injure, de n' estre jamais souffreteux, & au surplus donner la vogue à mes plaisirs comme j' avois le vent en poupe. De là, si tu le veux sçavoir, est issuë toute la source de mon mal. Et a fin que tu l' entendes tout au long, sçaches seigneur Comite que discourant sur toute cette ronde machine apres un long divorce de toutes choses en mon esprit, je resolu à la parfin un fondement perpetuel, sur lequel depuis je basty toutes mes pensees. Le fondement dont je te parle c' estoit Nature: de cette Nature, disois-je, si nous croyons aux Legistes, sont provignees toutes leurs loix, de cette mesme les Medecins prindrent naissance, lesquels pour cette occasion furent anciennement, ce me semble, en la France appellez par mot Grec Physiciens, de ceste Nature, les arts, de cette Nature, les sciences: Parquoy à cette grande Nature, faut generalement raporter toutes nos œuvres & pensemens. 

Or que me causa tout ce discours? une telle confusion que remaschant tout cecy en mon cerveau, il m' entra en teste, non du premier jour, ains petit à petit, & par quelque traicte de temps, que ce mot de larrecin avoit esté inventé par tyrans, la vengeance ostee par covards, & la copulation charnelle modifiee par personnes de petit effet, & qui mesuroient le commun devoir selon le cours de leurs puissances particulieres. Premierement je voyois que au cours de nostre premiere Nature tout estoit tellement uny, que sans aucune distinction du Mien & Tien un chacun vivoit à sa guise, mettant en communauté tout ce que lors la terre gaye produisoit de son propre instinct: de son propre instinct (dy-je) par ce que depuis ennuyee du tort que nous luy faisons, ayant donné de son creu aux uns & aux autres particuliers ce qui appartenoit au commun, retira dans ses entrailles toute sa force, deliberee de ne nous communiquer ses thresors, si elle n' estoit sollicitee d' an en an, par assidues instances & semonces de nos charrues. Ainsi devisant à par moy: Toutes choses sunt (sont) donc communes, & cestuy-cy disgratié en toutes parties, & seulement une image taillee en homme fera son propre du commun: Et moy pauvret, que nature voulut assortir d' un cœur genereux & hautain, feray hommage à cette Idole reparee, qui n' aura yeux pour considerer mes merites: ny aureilles pour les convertir à mes prieres? Plustost plustost m' envoye le Ciel tout ce desastre que souffrir vie si penible. Et en cette resolution conduisant mes discours à effect, je me mis veritablement à desrober, mais quelles choses? celles que je pensois communes: estimant que puis qu' on semoit sur le fonds auquel j' avois droict par nature, je n' en pouvois devoir au fort que les façons. Et ainsi continuay de là en avant mes larcins, me chatoüillant en cest endroict, & flattant de la commune usance des autres, lesquels je voyois (encores que par mot desguisé) toutesfois sous le nom d' une trafique generale, estre d' un mesme mestier que moy: estant loisible à un chacun de decevoir son compagnon jusques à la moitié de juste prix.

COMITE. Et viença gentil Philosophe, ne te devoit-il souvenir que par cette sotte opinion tu violois non seulement les loix humaines, mais aussi celles de Dieu, qui te commandent n' avoir rien de l' autruy?

I. FORÇAT. Je te diray, j' arrivay en fin sur ce poinct, & apres plusieurs tracassemens & destours, je m' advisay que cette mesme police de communauté se tenoit dans les Religions plus recluses & familieres de l' observance du vieux temps. Au moyen dequoy je concluois qu' il falloit par necessité que celuy seul fust larron, qui troublant l' ordre de nature voulut attribuer à son usage peculier, ce qui estoit commun à tous: Ce ne suis-je doncques point, disois je, qui doive estre appellé larron, ains celuy qui premier mist bornes aux champs, celuy qui encourtina de murs les bourgades, bref, celuy qui plein de doute & soupçon, fortifia de frontieres son pays à l' encontre de son voisin, & tous ceux generalement qui serrez dans mesme cordelle, establissent toutes leurs loix sur cette particularité d' heritages & possessions. Estant donc en cette opinion, & envelopé dans ce labyrinthe de folie, folie puis-je bien nommer, puis que l' evenement me l' apprend, de cette opinion je tournay mon pensement en un autre erreur d' aussi fascheuse digestion, peut-estre que le premier. Fortune qui sur l' entree acheminoit mes entreprises à mon souhait, pour ne manquer d' honneste pretexte, me voulut de larron faire devenir gendarme.

COMITE. Un gendarme donc Philosophe. Et vrayement tu m' en veux conter, comme s' il y avoit en France autres Philosophes que ces grands Regens, qui de tout temps se sont habituez és fameuses Universitez, comme est celle de Paris.

I. FORÇAT. La plus part de ceux dont tu parles sont maistres és Arts, & qui n' apprindrent onc autre chose que de parler congruement, avec quelques petites fleurettes & embellissemens d' histoires Grecques ou Latines, dont ils reparent leurs escrits: mais que jamais ils sonderent profondement les poincts qu' ils jugent infaillibles, je meure si tu en trouves un tout seul.

COMITE. Certainement tu me fais rire, & ne l' eusse jamais creu, mais pour ne t' esloigner de ton propos.

I. FORÇAT. Soudain que je me vey apoincté sous la charge d' un Capitaine (qui à la verité m' avoit en quelque reputation pour me veoir, contre l' ordinaire des siens, par fois sortir à mon honneur de quelque propos de merite) il m' entra en la fantaisie un certain esprit de vengeance, non point vrayement par legereté, comme tu peux apercevoir, en la plus part de ces nouveaux advanturiers, lesquels ne se voyent bransler l' espee à leur costé qu' ils n' accompagnent aussi tost leurs gestes d' un minois de mauvais garçon, avec une infinité de reniemens & blasphemes: mais conduisant toutes mes œuvres par discours, je ruminois que si par instigation de Nature nous devions bien vouloir à ceux qui nous moyennoient quelque bien, tout de la mesme raison devions nous mal vouloir aux autres qui nous pourchassoient nostre mal.

COMITE. Ouy, mais tu sçavois bien que nostre Religion t' enseignoit du tout le contraire: quand il est porté par expres de rendre le bien pour le mal. 

I. FORÇAT. Tu dis vray, mais je destournois ce passage en autre sorte que tu ne fais, le prenant à mon advantage pour article de conseil, & non de commandement. Pour cette cause conduisant ce mien propos jusques à mainmettre, je resolvois de souffrir plustost mille morts, que d' endurer une injure, opinion grandement louee entre nous autres Italiens, & davantage tant approuvee de toute memoire par la Noblesse de France, qu' il semble qu' anciennement celuy qui poursuivoit son injure ne fist tant acte de vengeance, que de deffence. A raison dequoy (si comme estranger je ne m' abuse en l' observation de vostre Langue) entre deffendre & revenger, vous autres Messieurs les François ne mettez point de difference. Tant y a que d' une mesme fonteine (fontaine), bien que les effects fussent divers, je tirois l' amitié d' un pere à un fils, l' honneur que l' on porte à la vieillesse, la compassion des desolez, la recognoissance des biens faicts, & finalement la vengeance, toutes lesquelles notions je reputois estre engravees en nous, par cette grande mere Nature par une taisible obligation: que successivement nous nous procurons l' un l' autre. Voire que si outre l' instinct de Nature on estimoit beaucoup les quatre premieres, pour l' occasion du public, cette derniere ne devoit moins estre estimee, a fin que celuy qui nous offençoit, apprit par son propre exemple à refrener ses injures, & ne faire tort à autruy: qui estoit un des premiers endoctrinemens de Justice. Que veux-tu plus? De larron je me fis brave homme, & soustenant le poinct d' honneur s' il en fut onc, sans toutesfois que pour l' exercice de l' un, je misse l' autre à nonchaloir. 

COMITE. Tu me contes icy merveilles, d' autant que malaisément ces deux qualitez s' accouplent ensemble, comme ainsi soit que l' une procede de la part d' un homme genereux & magnanime, & l' autre d' un cœur lasche & chetif. Car quant au tiers poinct concernant le plaisir des femmes, lequel tu n' as encores deduit, je ne m' en scandalise beaucoup, comme estant un peché commun, & qui nous est dés nostre jeunesse affecté par une certaine & cachee suggestion de Nature.

I. FORÇAT. La verité est telle que tu dis. Aussi faisant le foye ses distributions naturelles en nous, il envoye aux vaissaux spermatiques le sang plus espuré, comme à chaque autre de nos membres ce qui luy est plus necessaire pour l' entretenement de ce corps.

COMITE. Quand en tout ce que tu deduis il y eust eu quelque apparence, comme toutesfois il n' y a, pour une infinité de raisons que l' usage & sens commun nous a apprises, si est-ce qu' encores te falloit-il mettre frein & moyen à tes pensees. De ma part bien que je n' eusse jamais le loisir de passer tant de resveries en mon esprit, si est-ce que selon mon gros sens, il me semble que tu estois beste, & que si tu eusses esté plus sage, tu te fusses contenté de viure selon la loy de ton pays.

I. FORÇAT. Tu me rameines en une grande difficulté. Car qui sçait si j' eusse peu gaigner ce poinct sur moy, estant né pour estre quelque jour exposé en cette misere où tu me vois, & qu' il falloit que pour quelque mien meffait je fusse mis à la chiorme? Quoy que ce soit, pendant que trop ententif je conduis toutes mes actions au cours de cette brusque Philosophie, je suis tombé en l' estat où tu me vois à present. D' une chose te veux-je prier, pour toute conclusion, c' est que si en toy se loge quelque estincelle d' humanité, ainsi que ta face & façons m' en donnent certain prognostic, tu vueilles espargner envers moy la puissance que tu as de meffaire, & me traicter non selon ma presente fortune, ains selon celle de laquelle j' estois plus digne.

II. FORÇAT. Seigneur Comite, entens, je te prie, ce que j' ay à te dire, sans t' arrester si longuement aux paroles de cet Italien.

COMITE. Et qui es tu?

II. FORÇAT. Qui je suis? à peine te le puis-je dire en ces abysmes d' opinions, esquelles nous sommes maintenant plongez, voyant ces Philosophes masquez tels que celuy que tu as icy accosté, revoquer toutes choses en doute, voire celles qui sont plus claires que le jour. Car que te puis-je asseurer si je suis homme ou beste, puis que la plus part de nous tous, dessous un faux visage d' homme, couvrons des opinions bestiales? Toutesfois si tu veux sçavoir mon estre, sçaches que je suis né natif du monde.

COMITE. Tu ne nous dis rien de nouveau.

II. FORÇAT. Trop plus nouveau que cela que t' a dit ce sot Italien, quand sur le commencement de ses propos pour se magnifier envers toy, il s' est vanté estre yssu non seulement de l' Italie, mais aussi de cette grande villasse ou villegaste de Rome. Et quant à moy, encores que ceux qui eurent de moy cognoissance, pendant ma plus heureuse fortune, me publiassent de cette genereuse & brave nation de France, si n' en fey-je jamais aucun compte, ains tousjours reputay en moy cette loüange estre mal acquise, que l' on pensoit tirer d' une vaine opinion de son pays. D' autant qu' oncques nation si barbare ne se trouva qui n' enfantast de bons cerveaux: Vray que les emploites & exercices d' iceux se sont trouvez estre divers, selon la diversité des contrees, chacun accommodant son sens aux mœurs des Regions, & au cours des necessitez qu' il voyoit avoir plus de lieu és pays où ils s' estoit destiné de passager cette vie. 

COMITE. Sur mon Dieu, selon ce que j' en puis juger tu n' es point du tout hors de propos.

II. FORÇAT. Par là doncques tu peux cognoistre en cest Italien, dés l' entree de ses arraisonnemens, je ne sçay quoy de sa nation, c' est à dire d' un homme vanteur, & qui pour quelque heureux succez qui advint quelquesfois à ces vieux Romains, estime au regard de soy, le surplus de toutes nations barbare, non considerant toutesfois que tout ainsi que jadis cette Rome envahist la plus part de toute autre contree, chaque contree depuis a voulu avoir encontre elle sa revange: qui a tellement succedé, que de toute cette Italie ne luy reste que le nom. Bien est vray que pource qu' ils ouïrent dire que leurs ancestres sur toute chose eurent leur liberté en recommandation, tout ce demeurant depuis s' attachant sans plus à ce mot, imagina non pas une liberté telle que pratiquoient les Romains à la conduite de leur police, mais une certaine licence qu' eux tous rongent contre le public. De maniere que la plus part d' eux vivant sous une & autre domination, ne songe à autre chose qu' à quelques libertez mal basties, qui toutesfois luy sont bonnes, mais qu' elles tournent à son profit, quoy que peut estre elles se trouvent contrevenantes aux bonnes mœurs. De là sans chercher autre source, est venu toute l' ignorance de ce folastre Italien; de là est procedee l' imagination qu' il a de la communauté des choses. Imagination toutesfois non conceue pour autre raison, sinon pour autant que Nature dés la naissance de luy, ne fut en son endroit si prodigue de ses richesses, comme à plusieurs, d' autant que si dés son premier estre il eust rencontré la fortune plus favorable, maintenant eust-il presché tout d' autre sorte. Et tout de la mesme façon que ce gentil Philosophe a voulu approuver la communion des richesses, un autre aussi advisé, mais peut estre plus riche que luy, faisant un nez de cire à Nature, prouvera par elle mesme la separation des domaines, telle que la praticquons aujour-d'huy. Parquoy pour te dire en peu de paroles, Comite, ce n' est point Philosophie, ains plustost vraye folie, vouloir par un particulier jugement retifuer contre l' esperon de nos loix: ains me semble qu' en un seul mot tu luy as trop plus que Philosophiquement coupé la broche, quand d' un bon sens naturel sur la fin de ses propos, tu luy as dit que posé que tous ses discours fussent de quelque apparence, si les falloit-il abhorrer, pour autant que comme le bon soldat il ne vivoit point au commandement de son Capitaine. Car pour te dire le vray (outre ce que tous les poincts qu' il a eu grand peine à te faire trouver bons, sont du tout contrevenans à nostre Christianisme) certes des choses qui touchent à la loy, mais qu' elles nous soient donnees à entendre, la dispute nous en doit estre du tout retranchee: autrement si vous en levez les defenses, vous ferez d' une souche autant de branches, comme vous les avrez entees en une diversité de cerveaux, & s' entretiendra un chacun en cette loy selon le cours de ses humeurs, ou de ce qu' il verra luy estre le plus expedient & apoint, pour parvenir à son intention.

COMITE. Tu dis vray, mais viença quand je m' advise. Esclave, pour quel forfaict fus tu doncques confiné en ce lieu? Car je croy par cette foy si asseuree que tu as ton Prince, que qui ne t' y eust amené tu n' y fusses jamais venu de ton bon gré.

II. FORÇAT. En bonne foy, Comite, ce n' a esté mon delict, mais ma bonté qui m' a pourchassé cette peine.

COMITE. Seigneur Dieu voicy des merveilles.

II. FORÇAT. Patience, car s' il te plaist que tout au long je te raconte le temps passé de ma vie, croy m' en Comite, & t' en informes plus amplement si bon te semble, par ceux qui ont de moy cognoissance, oncques jour de ma vie je ne pensay de transgresser ma loy d' un seul poinct, de propos deliberé, ains tousjours me suis evertué de me conformer au cours d' icelle, & en ce faisant ne faire au prejudice d' autruy chose qui me tourneroit à desplaisir, estant attentee contre moy. Premierement tout mon dessein fut de mener une vie calme, bannie de cette grande Cour des Seigneurs, & semblablement des tumultes & chiquaneries des Cohues, non toutesfois qu' en ce projet je ne recogneusse fort bien n' estre point né pour moy seul. Au moyen dequoy je determinay aider aux necessiteux de mon bien, ou de mon conseil, selon l' exigence des cas: qui m' apporta telle faveur & applaudissement envers un simple populaire, que de ceux qui me cognoissent je fus reputé pour un Roy: Roy veritablement estois-je, par ce que sans passion je guidois toutes mes œuvres, & si je voyois quelques uns, comme zelateur du pien public s' aigrir encontre la justice, estimans par leur opinion particuliere qu' elle fust mal administree, ou murmurer contre la licence des grands, comme outrageusement entreprenans sur la liberté du commun, au contraire tousjours je pensois que tout se faisoit pour un bien, voire que les choses allans mal (ce que je ne me pouvois faire acroire) il falloit que d' un grand desordre s' engendrast à la fin finale un ordre, ainsi que de l' ancien Chaos & confusion s' escloyt la concorde universelle de toutes choses. Et au surplus je resolvois que c' estoit combatre son umbre, d' entrer en telles vanitez, desquelles le remede gisoit en la seule main du Seigneur: non de ce seigneur superficiel, qui n' est que comme une monstre de l' autre, mais de celuy qui luy seul tient le gouvernail de ce monde: partant que trop meilleur estoit sans se tourmenter vainement ny des honneurs, ny de l' heur ou malheur de nostre saison, penser qu' il n' y eut jamais homme qui se contentast de son temps. Ainsi vivois-je en ma maison reiglee pour te dire sans vanterie, comme une vraye Republique, distribuant les offices à un chacun de ma famille, & ce que chacun avoit à faire selon la grandeur & portee de son esprit: faisant à tous mes serviteurs faveur selon le poids de leurs merites: Chose trop longue à te deduire: suffise toy Seigneur Comite, qu' estant en cette tranquillité & repos de mon esprit cogneu des hommes vertueux, non toutesfois bien voulu de quelques favoris des Dieux, fortune jalouse de mon heur, ou peut estre me prenant pour un autre, me procura tout le desastre auquel tu vois que je suis.

COMITE. Et vrayement tu avois trop bonne ame pour estre envoyé aux galeres.

II. FORÇAT. Je prosperois & accroissois moyennement mon avoir, sans faire tort à autruy: mon bien pour te le faire court, a esté cause de mon mal.

I. FORÇAT. Et comment estois tu si sot, puis que comme homme de cerveau tu pouvois discerner aisément que l' origine de ton malheur provenoit de tes richesses, que tu ne les abandonnois premier que de tomber en tel accessoire?

II. FORÇAT. Il n' en a pas tenu à moy, & le Castor me donnoit enseignement de ton dire; mais il estoit necessaire, a fin qu' on ne faillist de pretexte, prendre le corps pour avoir confiscation de mes biens.

COMITE. Tu nous conte icy merveilles, comme si ceux qui tiennent la Justice en main se fussent de tant oubliez.

II. FORÇAT. Ceux dont tu parles jugent par l' examen & instruction de tesmoins, à cause dequoy est fort facile leur imposer, sans toutesfois que pourtant il leur faille rien improperer de leur office. Car leur estant la loy prefixe comment ils doivent proceder sur nostre vie ou nostre mort, que peuvent-ils faire de moins, que s' arrester en la preuve qu' ils ont tiree de l' asseurance & confrontation de quelques hommes, de la parole desquels depend le fil de nostre vie, en tel cas? Partant, ce n' est point à mes Juges à qui j' en porte maltalent, ny semblablement à celuy qui par une liberalité de mon Prince possede aujourd'huy tout mon bien, car paraventure par une mesgarde, & sous un faux donner à entendre s' est-il acheminé à la poursuite de ma ruine. Et à qui doncques? peut estre à mon Instigateur? certes nenny: pour autant que j' ay opinion que par permission divine cet homme ait esté suscité pour executer contre moy le jugement de Dieu, lequel à la longue s' il luy plaist sortira meilleur effect.

COMITE. Et je te jure mon Dieu qu' oncques telle patience je ne veis dessous cette cappe du ciel. Mais encore, as-tu point eu de regret apres la perte de tous tes biens, d' estre exposé aux bastonnades & anguillades de ces galeres?

II. FORÇAT. N' en fais doute, d' autant que je n' approuvay & n' esprouvay jamais l' indoleance tant preschee & solemnisee par quelques vieux radoteux & Philosophes de pierre, toutesfois ayant par une longue traicte recueilly en moy mes esprits, joint que c' estoit un faire le faut, duquel je ne me pouvois dispenser, je concluds de porter mon mal non sans grande douleur de mon corps, estant inacoustumé de recevoir telles caresses: mais avec telle patience que le discours des choses humaines me le pouvoit moyenner. Parquoy amassant toute cette masse de l' Univers ensemblement, je commençay à courir sur les Roys, Princes, & grands Seigneurs, puis sur les Magistrats & autre telle maniere de gens, qui tiennent le second rang entre nous, & ainsi de l' un à l' autre entretenant mes discours, je voyois que nous tous tirions unanimement à la rame, non vrayement manuellement, mais que chacun de nous estant ainsi qu' en une grande mer, agitez des flots & vagues, n' estions non plus que des pauvres galiots, jamais en repos, jusques à ce qu' eussions pris terre, receptacle de tous nos maux, quand apres avoir satisfaict au commun cours de nos miseres, en fin de jeu sommes contraincts luy sacrifier la derniere despouille de nous. Car si tu y prens garde de pres tu trouveras que combien que le populaire soit serf & vassal des grands Seigneurs, qu' eux mesmes en cette affluence de biens & faveur de toutes choses, se rendent les uns des autres esclaves, pour se maintenir en grandeur: Parce qu' un chacun plus veut il

estre grand & embrasser l' ambition, plus sent-il de fleaux & molestes dans son ame. Tellement qu' au plus grand contentement de ce monde, encores n' est-il pas content. Or est-ce une chose asseuree qu' oncques aucun de nous ne naquit, moyennant qu' il fust accompagné de quelque petit esprit, qu' il n' aspirast quant & quant à monter aux honneurs, & aux biens, sans trouver assouvissement. Ainsi sommes nous tous miserables: voire ceux qui par commune reputation des idots (idiots) sont icy tenus pour heureux. A bon droit donc Seigneur Comite, dois-je prendre consolation, puis qu' en ma grande adversité j' ay pour compagnie les grands Roys.

COMITE. Consolation peux-tu prendre en ce grand repos d' esprit, & à la mienne volonté cher amy (car ainsi te veux-je nommer) que tels Esclaves que toy gouvernassent nos Republiques, ou pour le moins que les Magistrats qui ne te ressembleroient de cerveau, tinssent le lieu que tu tiens icy. Et au surplus, tant s' en faut que j' esgale la condition de plusieurs tyrans à la felicité de la tienne, qu' au contraire je t' estime sans aucune comparaison plus heureux: attendu que sans aucune forfaicture en une tranquilité d' esprit, tu souffres quelque mal du corps, & eux en un aise du corps endurent une infinité de traverses d' esprit, & remords de conscience, avec une perpetuelle tare & infamie, qui leur demeure & leur demeurera de leurs extorsions tyranniques. Parquoy, te voyant de si bonne paste, je me delibere desormais jurer une eternelle alliance avec toy, à la charge que tu pourras faire estat de moy, comme de ta propre personne. 

II. FORÇAT. Seigneur Comite, j' accepte ta bonne volonté, en attendant qu' avec plus heureuse fortune je te puisse donner à cognoistre combien j' ay ton amitié agreable. Et toutesfois puis qu' en cette mienne adversité tu me veux faire tant de bien de me choisir des tiens, encores ne me puis je abstenir que je ne recommande cest Italien, lequel je te prie avoir en mesme degré que moy, parce qu' il n' en est indigne, & y a quelque cas en luy duquel tu dois faire compte.

COMITE. Je ne t' esconduiray pour ce coup, & ores que je sçache bien que nous autres & luy soyons grandement differens de mœurs & complexions, pour la diversité des pays, que la Nature mesme voulut separer d' un grand entreject de montagnes, pour n' avoir rien que sourdre ou partager les uns avec les autres, si le veux-je bien à ta semonce adjouster à nostre compagnie en tiers-pied, a fin que d' oresnavant par ton moyen & le sien nous puissions tromper la marine, par quelques propos d' eslite, pendant que ces autres forçats, pour toute consolation, s' amuseront de s' entretromper de bayes, & donner la mocque l' un à l' autre.

Fin du Pour-parler de la Loy.

lunes, 7 de agosto de 2023

Marquis, Marques, Marqués, Marche, Marchio; Comes, commis, Comite, Comte

Marquis, Marchal, Mareschal, Maire.

CHAPITRE LIV.

Mon opinion est que le mot de Marquis signifie un Estat anciennement inventé pour la protection & deffence des pays frontiers, & limitrophes, que nous appellons de tout temps & ancienneté Marches. En la vie du Debonnaire, dans la vieille Chronique de S. Denis: Au mois de May tint l' Empereur Parlement à Aix la Chappelle. Là vindrent les Messagers des Bulgeois qui moult longuement avoient demeuré en Baviere: Si estoit telle leur intention, qu' apres la confirmation de Paix & alliance, on traictast debonnairement des Marches qui sont entre les Bulgeois, Allemands, & François Austrasiens. Mot certes fort ancien, & usurpé par plusieurs fois par Aimoin en son Histoire, mais par passage merveilleusement exprés au cent dixhuictiesme chapitre de son quatriesme livre, où il dit que le mesme Debonnaire tint Parlement en la mesme ville d' Aix, où l' on traicta du fait de la guerre, puis adjouste, Simili modo de Marcha Hispanica constitutum est, & hoc illius limitis praefectis imperatum:
c' est à dire, En cas semblable il fut en ce lieu arresté touchant la Marche d' Espagne, & enjoinct d' y avoir esgard à ceux qui avoient la charge de cette frontiere: Auquel endroit vous voyez en moins de rien Marche & Limite estre pratiquez l' un pour l' autre, à cette occasion dirent nos anciens Marchir, pour confiner à quelque pays. Froissard au 3. volume: La Comté de Blois marchist à la Duché de Touraine. Et en la sus mentionnee Histoire de S. Denis: Ils degasterent la contree d' unes gens qui pres eux marchissoient, qu' on appelloit Toringiens: Et en la vie de Philippes fils de Henry: Si advint en ce temps qu' entre Adam l' Abbé S. Denis, & Boucard de Mont-morency sourdit contention pour aucunes de leurs terres, qui ensemblement marchissoient. Et de là à mon jugement vint celuy que nous appellasmes en François Marquis, & en Latin Marchio, je veux dire celuy auquel on commettoit la garde des lisieres d' un pays: Pour l' explication duquel mot les Romains furent contraints avant le desbord des nations Septentrionales user d' une periphrase, & circonlocution, estant par eux appellé celuy qui estoit commis pour garder les limites d' Orient Comes limitis Orientis, qui vaut autant à dire comme si nous disions Comte des Marches du Levant. De cette mesme façon use assez souvent Aimoin: Car vous y trouverez tantost un Praefectus limitis Britannici, tantost un Custos Avarici limitis, & neantmoins le mesme autheur le definit d' un tout seul mot au chap. 2. du 5. livre, auquel lieu parlant du Debonnaire Roy pour lors d' Aquitaine, qui fut mandé par Charlemagne son pere, Accersivit filium iam bene equitantem cum omni populo militari, relictis tantum Marchionibus, qui fines regni tuentes omnes, si forte ingruerent, hostium arcerent incursus. Or comme ainsi soit que pour distinguer les Marches & limites, l' on ait accoustumé d' asseoir bornes, que l' on peut appeller Marques, aussi avons nous façonné entre nous une diction qui respond à cette signification. Car nous appellons Marcher ou marquer, toutes & quantesfois que par signal, affiche, recognoissance, ou autrement nous assignons certains buts, limites, & separations entre les personnes, & de cette parole ainsi prise vient que nous appellons Marchal des logis du Roy celuy qui marche ou marque, & assigne diversement les logis aux domestiques de la maison du Roy, & Marchal du camp celuy qui marque & departit aux uns & autres Capitaines les Cantons & assietes diverses du camp. Car comme je viens de toucher, marcher & marquer, n' est qu' un, & en use-l'on indifferemment en commun langage, comme mesmes vous recognoistrez plus à plein dans les œuvres de Clement Marot. Tellement que c' est errer d' appeller telles gens Mareschaux des logis du Roy, ou du Camp, d' autant que le mot de Mareschal, qui reçoit l' e s' aproprie vrayement aux quatre Mareschaux de France, & vient de deux dictions corrompuës Maire, qui est une alteration, & changement de Maistre, & Chal pour Cheval, comme si on les eust voulu dire estre Maistre de la Chevalerie apres un Connestable (comite stabuli) de France. Quelques-uns toutesfois sont d' advis comme du Tillet, qu' il vient du mot de Marsk (Mark) qui signifioit Cheval, soit l' un ou l' autre, je m' en rapporte à ce qui en est.

Marquis, Marques, Marqués, Marche, Marchio; Comes, commis, Comite, Comte

Marquis, Marchal, Mareschal, Maire.

CHAPITRE LIV.

Mon opinion est que le mot de Marquis signifie un Estat anciennement inventé pour la protection & deffence des pays frontiers, & limitrophes, que nous appellons de tout temps & ancienneté Marches. En la vie du Debonnaire, dans la vieille Chronique de S. Denis: Au mois de May tint l' Empereur Parlement à Aix la Chappelle. Là vindrent les Messagers des Bulgeois qui moult longuement avoient demeuré en Baviere: Si estoit telle leur intention, qu' apres la confirmation de Paix & alliance, on traictast debonnairement des Marches qui sont entre les Bulgeois, Allemands, & François Austrasiens. Mot certes fort ancien, & usurpé par plusieurs fois par Aimoin en son Histoire, mais par passage merveilleusement exprés au cent dixhuictiesme chapitre de son quatriesme livre, où il dit que le mesme Debonnaire tint Parlement en la mesme ville d' Aix, où l' on traicta du fait de la guerre, puis adjouste, Simili modo de Marcha Hispanica constitutum est, & hoc illius limitis praefectis imperatum:
c' est à dire, En cas semblable il fut en ce lieu arresté touchant la Marche d' Espagne, & enjoinct d' y avoir esgard à ceux qui avoient la charge de cette frontiere: Auquel endroit vous voyez en moins de rien Marche & Limite estre pratiquez l' un pour l' autre, à cette occasion dirent nos anciens Marchir, pour confiner à quelque pays. Froissard au 3. volume: La Comté de Blois marchist à la Duché de Touraine. Et en la sus mentionnee Histoire de S. Denis: Ils degasterent la contree d' unes gens qui pres eux marchissoient, qu' on appelloit Toringiens: Et en la vie de Philippes fils de Henry: Si advint en ce temps qu' entre Adam l' Abbé S. Denis, & Boucard de Mont-morency sourdit contention pour aucunes de leurs terres, qui ensemblement marchissoient. Et de là à mon jugement vint celuy que nous appellasmes en François Marquis, & en Latin Marchio, je veux dire celuy auquel on commettoit la garde des lisieres d' un pays: Pour l' explication duquel mot les Romains furent contraints avant le desbord des nations Septentrionales user d' une periphrase, & circonlocution, estant par eux appellé celuy qui estoit commis pour garder les limites d' Orient Comes limitis Orientis, qui vaut autant à dire comme si nous disions Comte des Marches du Levant. De cette mesme façon use assez souvent Aimoin: Car vous y trouverez tantost un Praefectus limitis Britannici, tantost un Custos Avarici limitis, & neantmoins le mesme autheur le definit d' un tout seul mot au chap. 2. du 5. livre, auquel lieu parlant du Debonnaire Roy pour lors d' Aquitaine, qui fut mandé par Charlemagne son pere, Accersivit filium iam bene equitantem cum omni populo militari, relictis tantum Marchionibus, qui fines regni tuentes omnes, si forte ingruerent, hostium arcerent incursus. Or comme ainsi soit que pour distinguer les Marches & limites, l' on ait accoustumé d' asseoir bornes, que l' on peut appeller Marques, aussi avons nous façonné entre nous une diction qui respond à cette signification. Car nous appellons Marcher ou marquer, toutes & quantesfois que par signal, affiche, recognoissance, ou autrement nous assignons certains buts, limites, & separations entre les personnes, & de cette parole ainsi prise vient que nous appellons Marchal des logis du Roy celuy qui marche ou marque, & assigne diversement les logis aux domestiques de la maison du Roy, & Marchal du camp celuy qui marque & departit aux uns & autres Capitaines les Cantons & assietes diverses du camp. Car comme je viens de toucher, marcher & marquer, n' est qu' un, & en use-l'on indifferemment en commun langage, comme mesmes vous recognoistrez plus à plein dans les œuvres de Clement Marot. Tellement que c' est errer d' appeller telles gens Mareschaux des logis du Roy, ou du Camp, d' autant que le mot de Mareschal, qui reçoit l' e s' aproprie vrayement aux quatre Mareschaux de France, & vient de deux dictions corrompuës Maire, qui est une alteration, & changement de Maistre, & Chal pour Cheval, comme si on les eust voulu dire estre Maistre de la Chevalerie apres un Connestable (comite stabuli) de France. Quelques-uns toutesfois sont d' advis comme du Tillet, qu' il vient du mot de Marsk (Mark) qui signifioit Cheval, soit l' un ou l' autre, je m' en rapporte à ce qui en est.

8. 54. Marquis, Marchal, Mareschal, Maire.

Marquis, Marchal, Mareschal, Maire.

CHAPITRE LIV.

Mon opinion est que le mot de Marquis signifie un Estat anciennement inventé pour la protection & deffence des pays frontiers, & limitrophes, que nous appellons de tout temps & ancienneté Marches. En la vie du Debonnaire, dans la vieille Chronique de S. Denis: Au mois de May tint l' Empereur Parlement à Aix la Chappelle. Là vindrent les Messagers des Bulgeois qui moult longuement avoient demeuré en Baviere: Si estoit telle leur intention, qu' apres la confirmation de Paix & alliance, on traictast debonnairement des Marches qui sont entre les Bulgeois, Allemands, & François Austrasiens. Mot certes fort ancien, & usurpé par plusieurs fois par Aimoin en son Histoire, mais par passage merveilleusement exprés au cent dixhuictiesme chapitre de son quatriesme livre, où il dit que le mesme Debonnaire tint Parlement en la mesme ville d' Aix, où l' on traicta du fait de la guerre, puis adjouste, Simili modo de Marcha Hispanica constitutum est, & hoc illius limitis praefectis imperatum: c' est à dire, En cas semblable il fut en ce lieu arresté touchant la Marche d' Espagne, & enjoinct d' y avoir esgard à ceux qui avoient la charge de cette frontiere: Auquel endroit vous voyez en moins de rien Marche & Limite estre pratiquez l' un pour l' autre, à cette occasion dirent nos anciens Marchir, pour confiner à quelque pays. Froissard au 3. volume: La Comté de Blois marchist à la Duché de Touraine. Et en la sus mentionnee Histoire de S. Denis: Ils degasterent la contree d' unes gens qui pres eux marchissoient, qu' on appelloit Toringiens: Et en la vie de Philippes fils de Henry: Si advint en ce temps qu' entre Adam l' Abbé S. Denis, & Boucard de Mont-morency sourdit contention pour aucunes de leurs terres, qui ensemblement marchissoient. Et de là à mon jugement vint celuy que nous appellasmes en François Marquis, & en Latin Marchio, je veux dire celuy auquel on commettoit la garde des lisieres d' un pays: Pour l' explication duquel mot les Romains furent contraints avant le desbord des nations Septentrionales user d' une periphrase, & circonlocution, estant par eux appellé celuy qui estoit commis pour garder les limites d' Orient Comes limitis Orientis, qui vaut autant à dire comme si nous disions Comte des Marches du Levant. De cette mesme façon use assez souvent Aimoin: Car vous y trouverez tantost un Praefectus limitis Britannici, tantost un Custos Avarici limitis, & neantmoins le mesme autheur le definit d' un tout seul mot au chap. 2. du 5. livre, auquel lieu parlant du Debonnaire Roy pour lors d' Aquitaine, qui fut mandé par Charlemagne son pere, Accersivit filium iam bene equitantem cum omni populo militari, relictis tantum Marchionibus, qui fines regni tuentes omnes, si forte ingruerent, hostium arcerent incursus. Or comme ainsi soit que pour distinguer les Marches & limites, l' on ait accoustumé d' asseoir bornes, que l' on peut appeller Marques, aussi avons nous façonné entre nous une diction qui respond à cette signification. Car nous appellons Marcher ou marquer, toutes & quantesfois que par signal, affiche, recognoissance, ou autrement nous assignons certains buts, limites, & separations entre les personnes, & de cette parole ainsi prise vient que nous appellons Marchal des logis du Roy celuy qui marche ou marque, & assigne diversement les logis aux domestiques de la maison du Roy, & Marchal du camp celuy qui marque & departit aux uns & autres Capitaines les Cantons & assietes diverses du camp. Car comme je viens de toucher, marcher & marquer, n' est qu' un, & en use-l'on indifferemment en commun langage, comme mesmes vous recognoistrez plus à plein dans les œuvres de Clement Marot. Tellement que c' est errer d' appeller telles gens Mareschaux des logis du Roy, ou du Camp, d' autant que le mot de Mareschal, qui reçoit l' e s' aproprie vrayement aux quatre Mareschaux de France, & vient de deux dictions corrompuës Maire, qui est une alteration, & changement de Maistre, & Chal pour Cheval, comme si on les eust voulu dire estre Maistre de la Chevalerie apres un Connestable (comite stabuli) de France. Quelques-uns toutesfois sont d' advis comme du Tillet, qu' il vient du mot de Marsk (Mark) qui signifioit Cheval, soit l' un ou l' autre, je m' en rapporte à ce qui en est.

miércoles, 14 de diciembre de 2022

XV. Donatio turris, quam Gerundellam vocant, ad ecclesiam Gerundensem: ann. MXX. (1020)

XV.


Donatio
turris, quam Gerundellam vocant, ad ecclesiam Gerundensem: ann. MXX.
(1020) (Vid. pág. 180.)


Ex.
Lib. virid. Cap. eccl. Gerunden. fol. 187.


In
Dei nomine ego Ermessendis gratia Dei Comittissa simul cum prole meo
Berengario, Comite et Marchio donatores sumus Deo et Sancta Maria
Sedis Gerundae aliquod ex alode nostro quod habemus infra muros
predicta civitate Gerunda. Donamus namque et concedimus a predicta
Sancta Maria propter amorem Dei et eius Genitricis vel omnibus
Sanctis, et propter remedium animae nostrae sive pro anima Raymundi
Comitis
bonae memoriae, cui requies sit perpetua a Deo concessa. Et
est alodis videlicet ipsa turre rotunda cum ipsos muros qui sunt ex
utraque parte in circuitu de ipsa turre, et cum ipso casale vel curte
qui est ante ipsa turre: qui affrontat predictus alodius vel turre
cum muribus sive parietibus de oriente in ipso alode vel pariete de
Othone, levita, qui fuit de quondam Poncione: de meridie in ipsa
ecclesia de Sancta Maria, sive in ipso cimiterio de predicta
ecclesia. De occiduo afrontat in alode de Sancta Maria, ubi
Raymundus, levita habitabat. De vero circii affrontat predicto alode
cum turre et muros in nostro proprio alode vel in vinea de nos
donatores, vel de Raymundo, qui fuit quondam Comite, qui advenit
predicta omnia ad me Ermessendis Comitissa per donatione de viro meo
Raymundo Comite
vel per meum decimum et ad me Berengario per vocem
parentorum. Quantum istas quattuor affrontationes includunt sic
donamus et tradimus Deo et Sancta Maria totum ab integrum cum exiis
et earum regressis ut ex presenti die vel in perpetuum clericis Deo
et Sancta Maria habeat potestatem ad possidendum in servitio Sancta
Maria. Quod si nos donatores aut ullus homo vel foemina qui contra
ista scriptura venerit ad irrumpendum, non hoc valeat vindicare quod
requirit, set predicto
 alode
componat aut componamus in duplo cum omni sua inmelioratione Deo et
Sancta Maria, et in antea ista scriptura donationis firmitatem
optineat omnique tempore. Facta ista scriptura donatione II. kalendas
aprilis anno XX quarto quod regnare coepit Robertus in Francia.


Sig+num
Ermessendis gratia Dei Comitissa qui ista donatione feci et firmare
rogavi. = Sig+num Berengarii gratia Dei Comes. = Amado Vicecomes. =
Sig+num Udalardus. = Sig+num Raymundus Oliba. = Odegario ss. =
Bernardus sacer qui ista carta donationis scripsit sub die et anno +
quo supra.

viernes, 6 de julio de 2018

Origen de Aragón

Mol se parle de Aragó pero, sabem cuán apareix per primera vegada este terme? Quin es lo seu origen y qué signifique? En realidat no ña una única explicassió, pero les diferentes investigassións que s´han fet al respecte mos han dixat algunes possibilidats que potsé puguen aclariu.
L´origen linguístic mes asseptat per los investigadós es lo celta, pos este poble y atres tamé indoeuropeus van habitá una bona part de la península ibérica abáns de la arribada de cartaginesos y romanos. De fet, los que díen celtíberos los autós romanos van habitá bona part del actual Aragó, y mes concretamen la zona del Moncayo, la vall del riu Jalón, la vall alta del Ebre y bona part del mich, arribán inclús hasta casi les portes de Salduie, lo poblat íbero aon se va fundá mes tart la Saragossa romana, Caesar Augusta.
Pero, qué tenen que vore los celtas y los indoeuropeus en lo terme Aragó? Pos pot sé que tingue que vore en la llengua. Lo celtíbero es una llengua celta que, com moltes atres a Europa y Asia, prossedixen venen de una mateixa arraíl linguística: la indoeuropea. Per a que mos faiguem una idea, durán milenios van existí una serie de llengües mol paregudes o acomparades originades de la mateixa arraíl desde la India y lo Turquestán que, en lo pas del tems, se van aná expandín per Europa y van aná evolussionán en unes atres llengües que anaben interactuán entre sí o diferensianse, en un prossés mol similar al de les llengües romances - castellá, catalá, valensiá, mallorquí, aragonés, fransés, italiá - que vindríen del latín que per sert es a la vegada una llengua indoeuropea.

Dins de la llengua celta, existixen les arraíls "ara" , "ar", y "aar", que servixen per a parlá de corréns de aigua. Per ficá un ejemplo, a Suiza existix actualmén un riu anomenat Aar, y lo nom ve pressisamen de esta arraíl celta. Al coneixe a siénsia serta la presénsia celta a la península, es probable que de la mateixa forma la gen faiguere aná eixes arraíls per a referís a diferéns cursos de aigua y en lo tems van aná evolussionán mes o menos, segóns cada cas. 

De ahí podríe vindre lo nom de “Aragó” per a referís al riu mes importán de la zona pirenaica -potsé significare “riu gran”, encara que aixó es aventurás massa-. 
De “ar” o “ara” vindríe finalmen lo terme “Arago“, que en la seua evolussió latina arribaríe finalmen a Aragó per a designá al actual riu Aragón, que después donaríe lo nom a la zona que atravesse. De fet, varios son los rius  als Pirineus que tenen eissa mateixa arraíl mes o menos evolussionada, como lo Aragón Subordán o inclús lo riu Ara.

Un atra opsió coloque lo origen del terme “Aragó” a la poblassió de origen vascón, pos realmen se coneix una importán influénsia vascona no sol al actual Pays Bas y Navarra, sino tamé en territori del actual Aragó, hasta la zona de Ejea de los Caballeros. Sin embargo, encara vinín de poblasió vasca, la arraíl “ar” vindríe igualmen del celta, pos va sé de esta llengua de aon la van agarrá en préstamo.
¿Cuán apareix per primera vegada “Aragón” a un documén?
San Juan de la Peña
Monasteri de San Juan de la Peña







Aquí sí que se pot indagá mes allá de hipótesis lingüístiques y acudí a documéns histórics, y lo que estos mos diuen hasta la fecha es que “Aragón”, com a nom per a designá a una o varies comunidats liderades por un mateix gobernán, es un de los mes antics de la Península Ibérica.
Un documén que perteneix al archiu del monasteri de San Juan de la Peña y fechat al añ 828 d.C. es lo mes antic conegut al que apareix la paraula “Aragón”. An este documén, lo rey García Jiménez de Pamplona y lo conde Galindo de Aragón fan una donassió al mensionat monasteri y lo mateix conde aragonés apareix reflejat com “comite Galindone de Aragon”. Mentrestán, lo de Navarra apareix per primera vegada al añ 1087, lo de Cataluña no apareix a un documén ofissial -testamén de Alfonso II– hasta finals del siglo XII, igual que lo de Portugal -també del mateix siglo-. L´únic que lo superaríe siría Castilla, pos ya apareix a documéns tan cristianos com islámics cap al añ 800.
Mucho hablamos de Aragón pero, ¿sabemos cuándo aparece por primera vez este término? ¿Cuál es su origen y qué significa? En realidad no hay una única explicación a este tema, pero las diferentes investigaciones que se han realizado al respecto nos han dejado algunas posibilidades que quizás puedan esclarecerlo.
El origen lingüístico más aceptado por los investigadores es el celta, pues este pueblo y otros también indoeuropeos habitaron una buena parte de la Península Ibérica antes de la llegada de cartagineses y romanos. De hecho, los llamados celtíberos por los autores romanos habitaron buena parte del actual Aragón, y más concretamente la zona del Moncayo, el valle del río Jalón, el valle alto del Ebro y buena parte del medio, llegando incluso hasta casi las puertas de Salduie, el poblado íbero sobre el que más tarde se fundó la Zaragoza romana.
Pero, ¿qué tienen que ver los celtas e indoeuropeos con el término “Aragón”? Pues puede que tengan que ver con la lengua. El celtíbero es una lengua celta que, como muchas otras en Europa y Asia, proceden de una misma raíz lingüística: la indoeuropea. Para que nos hagamos una idea, durante milenios existieron una serie de lenguas muy similares originadas en la misma raíz desde la India y el Turquestán que, con el paso del tiempo, se fueron expandiendo hacia Europa y que fueron evolucionando en más y más lenguas que iban interactuando  entre sí o diferenciándose, en un proceso muy similar a las lenguas romances -castellano, catalán, aragonés, francés, italiano,…- que vendrían del latín que, por cierto, es a su vez una lengua indoeuropea.
Dentro de la lengua celta, existen las raíces “ara“, “ar” y “aar“, que sirven para hablar de cursos de agua. Por poner un ejemplo, en Suiza existe actualmente un río llamado Aar, cuyo nombre viene precisamente de esa raíz celta. Al conocer a ciencia cierta la presencia celta en la península, es probable que de la misma forma la gente usara esas raíces para referirse a distintos cursos de agua y con el tiempo fueron evolucionando más o menos, según cada caso.
De ahí podría venir el nombre de “Aragón” para referirse al río más importante de la zona pirenaica -quizás significara “río grande”, aunque esto es aventurarse demasiado-. De “ar” o “ara” vendría finalmente el término “Arago“, que en su evolución latina llegaría finalmente a Aragón para designar al actual río Aragón, que después daría nombre a la zona que atraviesa. De hecho, varios son los ríos en los Pirineos que tienen esa misma raíz más o menos evolucionada, como el Aragón Subordán o incluso el río Ara.
Otra opción coloca el origen de término “Aragón” en población de origen vascón, pues realmente se conoce una importante influencia vascona no sólo en el actual Euskadi y Navarra, sino también en territorio del actual Aragón, hasta la zona de Ejea de los Caballeros. Sin embargo, aún viniendo de población vasca, la raíz “ar” vendría igualmente del celta, pues fue de esta lengua de donde la tomaron prestada.
¿Cuándo aparece por primera vez “Aragón” en un documento?
San Juan de la Peña
Monasterio de San Juan de la Peña
Aquí sí que se puede indagar más allá de hipótesis lingüísticas y acudir a documentos históricos, y lo que estos nos dicen hasta la fecha es que “Aragón”, como nombre para designar a un o varias comunidades lideradas por un mismo gobernante, es uno de los más antiguos de la Península Ibérica.
 Un documento perteneciente al archivo del monasterio de San Juan de la Peña y fechado en el año 828 d.C. es el más antiguo conocido en el que aparece la palabra “Aragón”. En él, el rey García Jiménez de Pamplona y el conde Galindo de Aragón realizan una donación al mencionado monasterio y el propio conde aragonés aparece reflejado como “comite Galindone de Aragon”. Mientras tanto, el de Navarra aparece por primera vez en el año 1087, el de Cataluña no aparece en un documento oficial -testamento de Alfonso II– hasta finales del siglo XII, al igual que el de Portugal -también del mismo siglo-. El único que lo superaría sería Castilla, pues ya aparece en documentos tanto cristianos como islámicos hacia el año 800.

Sergio Martínez Gil
Licenciado en Historia por la Universidad de Zaragoza

Origen de Aragón

Mol se parle de Aragó pero, sabem cuán apareix per primera vegada este terme? Quin es lo seu origen y qué signifique? En realidat no ña una única explicassió, pero les diferentes investigassións que s´han fet al respecte mos han dixat algunes possibilidats que potsé puguen aclariu.
L´origen linguístic mes asseptat per los investigadós es lo celta, pos este poble y atres tamé indoeuropeus van habitá una bona part de la península ibérica abáns de la arribada de cartaginesos y romanos. De fet, los que díen celtíberos los autós romanos van habitá bona part del actual Aragó, y mes concretamen la zona del Moncayo, la vall del riu Jalón, la vall alta del Ebre y bona part del mich, arribán inclús hasta casi les portes de Salduie, lo poblat íbero aon se va fundá mes tart la Saragossa romana, Caesar Augusta.
Pero, qué tenen que vore los celtas y los indoeuropeus en lo terme Aragó? Pos pot sé que tingue que vore en la llengua. Lo celtíbero es una llengua celta que, com moltes atres a Europa y Asia, prossedixen venen de una mateixa arraíl linguística: la indoeuropea. Per a que mos faiguem una idea, durán milenios van existí una serie de llengües mol paregudes o acomparades originades de la mateixa arraíl desde la India y lo Turquestán que, en lo pas del tems, se van aná expandín per Europa y van aná evolussionán en unes atres llengües que anaben interactuán entre sí o diferensianse, en un prossés mol similar al de les llengües romances - castellá, catalá, valensiá, mallorquí, aragonés, fransés, italiá - que vindríen del latín que per sert es a la vegada una llengua indoeuropea.

Dins de la llengua celta, existixen les arraíls "ara" , "ar", y "aar", que servixen per a parlá de corréns de aigua. Per ficá un ejemplo, a Suiza existix actualmén un riu anomenat Aar, y lo nom ve pressisamen de esta arraíl celta. Al coneixe a siénsia serta la presénsia celta a la península, es probable que de la mateixa forma la gen faiguere aná eixes arraíls per a referís a diferéns cursos de aigua y en lo tems van aná evolussionán mes o menos, segóns cada cas. 

De ahí podríe vindre lo nom de “Aragó” per a referís al riu mes importán de la zona pirenaica -potsé significare “riu gran”, encara que aixó es aventurás massa-. 
De “ar” o “ara” vindríe finalmen lo terme “Arago“, que en la seua evolussió latina arribaríe finalmen a Aragó per a designá al actual riu Aragón, que después donaríe lo nom a la zona que atravesse. De fet, varios son los rius  als Pirineus que tenen eissa mateixa arraíl mes o menos evolussionada, como lo Aragón Subordán o inclús lo riu Ara.

Un atra opsió coloque lo origen del terme “Aragó” a la poblassió de origen vascón, pos realmen se coneix una importán influénsia vascona no sol al actual Pays Bas y Navarra, sino tamé en territori del actual Aragó, hasta la zona de Ejea de los Caballeros. Sin embargo, encara vinín de poblasió vasca, la arraíl “ar” vindríe igualmen del celta, pos va sé de esta llengua de aon la van agarrá en préstamo.
¿Cuán apareix per primera vegada “Aragón” a un documén?
San Juan de la Peña
Monasteri de San Juan de la Peña







Aquí sí que se pot indagá mes allá de hipótesis lingüístiques y acudí a documéns histórics, y lo que estos mos diuen hasta la fecha es que “Aragón”, com a nom per a designá a una o varies comunidats liderades por un mateix gobernán, es un de los mes antics de la Península Ibérica.
Un documén que perteneix al archiu del monasteri de San Juan de la Peña y fechat al añ 828 d.C. es lo mes antic conegut al que apareix la paraula “Aragón”. An este documén, lo rey García Jiménez de Pamplona y lo conde Galindo de Aragón fan una donassió al mensionat monasteri y lo mateix conde aragonés apareix reflejat com “comite Galindone de Aragon”. Mentrestán, lo de Navarra apareix per primera vegada al añ 1087, lo de Cataluña no apareix a un documén ofissial -testamén de Alfonso II– hasta finals del siglo XII, igual que lo de Portugal -també del mateix siglo-. L´únic que lo superaríe siría Castilla, pos ya apareix a documéns tan cristianos com islámics cap al añ 800.
Mucho hablamos de Aragón pero, ¿sabemos cuándo aparece por primera vez este término? ¿Cuál es su origen y qué significa? En realidad no hay una única explicación a este tema, pero las diferentes investigaciones que se han realizado al respecto nos han dejado algunas posibilidades que quizás puedan esclarecerlo.
El origen lingüístico más aceptado por los investigadores es el celta, pues este pueblo y otros también indoeuropeos habitaron una buena parte de la Península Ibérica antes de la llegada de cartagineses y romanos. De hecho, los llamados celtíberos por los autores romanos habitaron buena parte del actual Aragón, y más concretamente la zona del Moncayo, el valle del río Jalón, el valle alto del Ebro y buena parte del medio, llegando incluso hasta casi las puertas de Salduie, el poblado íbero sobre el que más tarde se fundó la Zaragoza romana.
Pero, ¿qué tienen que ver los celtas e indoeuropeos con el término “Aragón”? Pues puede que tengan que ver con la lengua. El celtíbero es una lengua celta que, como muchas otras en Europa y Asia, proceden de una misma raíz lingüística: la indoeuropea. Para que nos hagamos una idea, durante milenios existieron una serie de lenguas muy similares originadas en la misma raíz desde la India y el Turquestán que, con el paso del tiempo, se fueron expandiendo hacia Europa y que fueron evolucionando en más y más lenguas que iban interactuando  entre sí o diferenciándose, en un proceso muy similar a las lenguas romances -castellano, catalán, aragonés, francés, italiano,…- que vendrían del latín que, por cierto, es a su vez una lengua indoeuropea.
Dentro de la lengua celta, existen las raíces “ara“, “ar” y “aar“, que sirven para hablar de cursos de agua. Por poner un ejemplo, en Suiza existe actualmente un río llamado Aar, cuyo nombre viene precisamente de esa raíz celta. Al conocer a ciencia cierta la presencia celta en la península, es probable que de la misma forma la gente usara esas raíces para referirse a distintos cursos de agua y con el tiempo fueron evolucionando más o menos, según cada caso.
De ahí podría venir el nombre de “Aragón” para referirse al río más importante de la zona pirenaica -quizás significara “río grande”, aunque esto es aventurarse demasiado-. De “ar” o “ara” vendría finalmente el término “Arago“, que en su evolución latina llegaría finalmente a Aragón para designar al actual río Aragón, que después daría nombre a la zona que atraviesa. De hecho, varios son los ríos en los Pirineos que tienen esa misma raíz más o menos evolucionada, como el Aragón Subordán o incluso el río Ara.
Otra opción coloca el origen de término “Aragón” en población de origen vascón, pues realmente se conoce una importante influencia vascona no sólo en el actual Euskadi y Navarra, sino también en territorio del actual Aragón, hasta la zona de Ejea de los Caballeros. Sin embargo, aún viniendo de población vasca, la raíz “ar” vendría igualmente del celta, pues fue de esta lengua de donde la tomaron prestada.
¿Cuándo aparece por primera vez “Aragón” en un documento?
San Juan de la Peña
Monasterio de San Juan de la Peña
Aquí sí que se puede indagar más allá de hipótesis lingüísticas y acudir a documentos históricos, y lo que estos nos dicen hasta la fecha es que “Aragón”, como nombre para designar a un o varias comunidades lideradas por un mismo gobernante, es uno de los más antiguos de la Península Ibérica.
 Un documento perteneciente al archivo del monasterio de San Juan de la Peña y fechado en el año 828 d.C. es el más antiguo conocido en el que aparece la palabra “Aragón”. En él, el rey García Jiménez de Pamplona y el conde Galindo de Aragón realizan una donación al mencionado monasterio y el propio conde aragonés aparece reflejado como “comite Galindone de Aragon”. Mientras tanto, el de Navarra aparece por primera vez en el año 1087, el de Cataluña no aparece en un documento oficial -testamento de Alfonso II– hasta finales del siglo XII, al igual que el de Portugal -también del mismo siglo-. El único que lo superaría sería Castilla, pues ya aparece en documentos tanto cristianos como islámicos hacia el año 800.

Sergio Martínez Gil
Licenciado en Historia por la Universidad de Zaragoza