Mostrando entradas con la etiqueta Moitoyen. Mostrar todas las entradas
Mostrando entradas con la etiqueta Moitoyen. Mostrar todas las entradas

lunes, 7 de agosto de 2023

8. 46. Mestayer, Moitoyen, Mien, & Tien.

Mestayer, Moitoyen, Mien, & Tien. 

CHAPITRE XLVI.

Encores que les Romains peussent en diverses façons affermer leurs terres tantost en argent, tantost à certaine quantité de grain, selon que les volontez des contractans les admonestoient de faire, si avoient-ils en tres-grande recommandation le loüage qui se faisoit de leurs terres, à moitié: Pour cette cause voyons nous estre faicte en leurs loix si frequente mention d' un Colon partiaire. (Les Latins l' appellent Colonum partiarium) & sur le declin mesme de l' Empire y eut une loy de l' Empereur Valentinian, par laquelle il estoit deffendu à tous Maistres d' affermer leurs terres en argent, ains de soy contenter de ce qu' elles rapporteroient, laquelle loy tout ainsi qu' elle a receu diverses significations par les Commentateurs de droict, pour ne la rendre point contrevenante à quelques autres; aussi ne suis-je point exposé en ce lieu pour discourir, si elle a esté en tout, & par tout entretenuë selon sa forme & teneur; ains me contenteray de l' avoir alleguee, pour monstrer que c' estoit chose assez familiere en la ville de Rome d' affermer ses terres à moitié de grain. Cette mesme coustume semble s' estre insinuee entre nos anciens: Car à bien dire le mot de Metayer nous est aussi propre pour cest effect que le Partiaire en Latin, l' un prenant sa derivation de Partiri, & l' autre du mot de moitié. Pour laquelle cause mesmement vous trouverez en quelques vieux contracts qui sont reduits en Latin tel que l' infelicité du temps portoit lors, que tels fermiers sont appellez d' un mot Barbare Medietarij, qui vaut autant que s' ils eussent esté appellez Partiarij. Depuis comme toutes choses prennent divers plis, aussi s' est ceste particularité de coustume changee: De maniere que soit que l' on baille en argent, ou en bled, ou à moitié, nous les appellons tous Metayers; Tout ainsi que nous avons veu de nostre temps en cette France toutes sortes d' heretiques avoir esté appellez Lutheriens, bien qu' ils eussent quelque opinion separee de Martin Luther: Mais parce que les affaires de l' Eglise estans bien composees, Luther avoit esté le premier, qui du temps de nos peres remüa l' Estat de nostre Religion. L' origine de cette diction Metayer fera peut estre juger que d' un mesme tige soit aussi procedé le mot de Moitoyen, pour autant qu' il semble avoir quelque affinité avecques l' autre: Toutesfois qui voudra rechercher cette ancienneté à son vray point, il trouvera à mon jugement que les choses vont tout autrement, & que sous une proximité, & rencontre de dictions il y a diversité de sources: Car aussi le Metayer, comme j' ay dit, signifie celuy qui partit à moitié avec son Maistre, & le Moitoyen signifie une chose commune, & que l' on ne divise: Mais au contraire que l' on tient, & possede par indivis. Parquoy pour entendre en peu de paroles dont vient ce mot, la verité est que ces deux mots Mien & tien, & aussi Mienne & tienne, furent incogneus à nos anciens: Mais comme ainsi soit que tels mots soient derivez de moy & toy, aussi au lieu de mienne & tienne ils disoient moye & toye, & au lieu de mien, & tien, moyen, & toyen. Guillaume de Lorris en son Roman de la Rose faisant hommage à Cupidon.

Quand sa bouche toucha la moye,

Ce fut ce dont au cœur j' eus joye.

Et Jean de Mehun apres luy, au mesme livre, en quelque lieu, où il faict mention d' un jugement donné à Rome:

Sire Juge donnez sentence 

Pour moy, car la pucelle est moye. 

Et en un autre endroict:

Apprenez moy donc en vos voyes

Lesquelles choses seront moyes.

En la vieille histoire de sainct Denis livre second, chapitre troisiesme, Bellissaire escrivant à l' Empereur Justinian: Ceux qui avoient envie de ta santé, & de la moye. Je sçay bien que l' on trouvera en plusieurs endroits du Roman de la Rose, qui est imprimé, Mien & tien: Mais il ne faut faire aucune doubte que ces passages sont corrompus par ceux qui de nostre temps ont pensé beaucoup meriter de la langue Françoise, en reduisant ce bon vieux livre au langage qui court à present: En quoy je ne puis que je n' accuse à bon droict la miserable diligence de tels gaste-tout, lesquels estimans faire quelque brave traict de leurs plumes, nous ont en la plus part eschangé, & ce bon vieux Roman de la Roze, & la vie de sainct Louys du Sire Jean de Joinville, & encores par une impression recente l' Histoire de Jean Froissard, ne considerans pas toutes-fois qu' en ce faisant ils nous frustroient entierement de la cognoissance de l' ancienneté de nostre langue, laquelle nous ne pouvons remarquer, singulierement dans le Roman, sinon par la fin, & cadance du vers, que l' on n' a peu changer à cause de la rime. Or que les anciens usassent de Moyen, & toyen, je l' ay mesmes appris de Maistre Raoul de Presles (qui fut long temps apres Guillaume de Lorris, & Jean de Mehun) au Livre par lequel il pretend monstrer, que la Monarchie de France ne recognoist en rien pour temporel l' authorité du Sainct Siege: Cette antiquité me faict penser que de Moyen, & Toyen, vient le mot de Moitoyen, dont nous usons par une elision de la derniere syllabe de Moyen, comme si nous eussions voulu dire que ce mur estoit Mien & Tien.