sábado, 5 de agosto de 2023

8. 22. De ce que par maniere de gausserie on appelle Puceaux ceux qui au soufle de leur haleine r'allument une chandelle esteinte.

De ce que par maniere de gausserie on appelle Puceaux ceux qui au soufle de leur haleine r'allument une chandelle esteinte.

CHAPITRE XXII.

Toutes & quantesfois qu' il advient qu' une chandelle, ou bougie esteinte est r'allumee par l' un de nous au soufle de nos haleines, une, deux, ou trois fois selon la force de la meche, ou luminon, où il reste quelque peu de feu, nous disons en gaussant que si c' est une homme, qu' il est puceau; si une femme, qu' elle est pucelle: Mais dont peut proceder cette drolerie de langage? Car ainsi suis-je contrainct de l' appeller. Il ne faut rechercher ne livre, ne histoire pour en rendre raison. Mon opinion est que quiconque donna cours à cette rencontre, estoit tout de contraire advis à celuy de Tertullian, lequel au premier livre qu' il escrit à sa femme, dit que la veufve a plus de peine de maintenir sa chasteté, que la pucelle, sa virginité. D' autant qu' il est aisé de ne souhaiter ce que vous ne sçavez & tout d' une suitte de resister à ce que ne desirastes jamais: Au contraire qu' il y a plus de gloire en celle qui sent son mal pour avoir fait experience du bien. En bon langage il en parle comme si une vierge ne sentoit les aiguillons de la chair, pour n' avoir esté mise en œuvre. Leçon qu' elle aprend de soy mesmes, par les instincts de la nature avec la promotion de ses ans. Quant à moy je pense qu' encores qu' en la copulation charnelle de l' homme & femme, il y a grande volupté, toutesfois que celuy qui ne l' a esprouvee que par imagination, la pense cent & cent fois plus grande qu' elle n' est. Pour le moins le recognoist-on en ces amoureux transis, lesquels apres avoir fait mille tours de cinges devant leurs maistresses, pour parvenir au poinct par eux pretendu, quelque temps apres qu' ils y ont attaint, se trouvent plus refroidis, qu' ils n' avoient esté auparavant eschauffez à la poursuitte de leur sottie. Et de fait le mesme Tertullian ne s' esloigne pas beaucoup de mon opinion, quand en son exhortation à la chasteté, il dit que la premiere felicité de la femme gist en sa premiere virginité, c' est à dire de n' avoir cognoissance de ce dont on est puis apres bien aise d' estre deliuré: comme s' il eust voulu dire qu' apres que ces premiers feux sont esteins en nous par l' attouchement mutuel, nous commençons de les mespriser. Ce qui n' advient pas à ceux qui mesurent ce plaisir par la seule imagination. Il n' y a rien en quoy Nature ait esté si sage, qu' és semences de cest appetit furieux, qu' elle espandit dans nos cœur. Remettez devant vos yeux les incommoditez enchainees qui se trouvent au mariage, une liberté que l' on captive soubs la servitude de tel, ou telle, que ne cognoissiez que d' un mois, qu' il faut que vostre vie soit attachee aux imperfections d' un autre, & les supporter dissimulément pour viure en paix. Que vostre honneur despende de la folie d' une femme au contraire que la sagesse d' une femme soit le plus du temps exposee soubs la tyrannie d' un sot, la grande despence necessaire qui est à la suitte de ce mesnage, beaucoup plus grande que d' un garçon. Brief que le plus grand fruict de vostre mariage despend des enfans, lesquels plus vous aymez, plus produisent-ils d' amertumes dedans vos ames, par leurs desbauches, leurs morts, le soing de leurs advancemens. Et au bout de cela, que c' est à la vie, & la mort qu' il en faut estre logé là. Remettez dis-je d' un esprit calme, toutes ces perplexitez devant vos yeux, vous fuyrez le mariage comme un escueil, ou precipice de vostre bien en malaise, & faudra vous y allecher par privileges, ou contraindre par amendes extraordinaires. Qui nous y semond doncques, & nous faict oublier tout cela? Cette furieuse apprehension du plaisir de l' homme à la femme, vray chef d' œuvre de la Nature, pour s' immortaliser en ses especes mortelles par une surrogation de l' un à l' autre: & cette apprehension estant beaucoup plus violente devant l' effect, qu' en apres: aussi est-il plus facile de le renouveller de jour à autre dedans nous, ores, ou que par la crainte de Dieu, ou de nostre honneur, nous les voulions amortir: Et tout ainsi que ce renouvellement advient aux feux interieurs de nos ames, par les objects qui se presentent devant nous, aussi pour venir au subject de ce present chapitre par une belle metaphore voulut-on appeller puceaux, ou pucelles ceux, ou celles, qui en souflant r'allument une chandelle esteinte, en laquelle il reste quelque feu en la meche

De ce que par maniere de gausserie on appelle Puceaux ceux qui au soufle de leur haleine r'allument une chandelle esteinte.

8. 21. Sainct Denis Mont-joye

Dont vient ce cry public, Sainct Denis Mont-joye, que l' on dit avoir esté autresfois usurpé par nos Roys en champ de bataille.

CHAPITRE XXI.

Il y a en chaque Republique plusieurs histoires que l' on tire d' une longue ancienneté, sans que le plus du temps l' on en puisse sonder la vraye origine, & toutesfois on les tient non seulement pour veritables, mais pour grandement auctorisees, & sacrosaintes. De telle marque en trouvons nous plusieurs tant en Grece, qu' en la ville de Rome: Et de cette mesme façon avons nous presque tiré entre nous, l' ancienne opinion que nous eusmes de l' Auriflame, l' invention de nos fleurs de lys, que nous attribuons à la Divinité, & plusieurs autres telles choses, lesquelles bien qu' elles ne soient aidees d' autheurs anciens, si est-ce qu' il est bien seant à tout bon citoyen de les croire pour la majesté d' un Empire. Et sous cette mesme creance, à mon jugement s' est insinuée entre nous l' opinion que le commun peuple a, que nos Roys anciennement en une affaire presente, & au meillieu d' une bataille avoient accoustumé quasi pour un mot solemnel de dire Sainct Denis Mont-joye. Comme mesmes Jeanne la Pucelle respondit à ses Juges, lors qu' ils luy improperoient qu' apres qu' elle fut blecee devant Paris, elle fit une offrande de ses armes à S. Denis, par forme de gloire & orgueil, elle respondit sagement que ce qu' elle en avoit fait, estoit par devotion seulement. D' autant que sainct Denis estoit le commun cry de la France en la bouche de ceux qui se trouvoient en telles meslees, Sainct Denis Mont-joye. Or dont ce mot ait pris son origine, je ne l' ay jamais leu dans les vieux autheurs, j' entends de ceux qui nous sont de quelque merite. Maistre Raoul de Presles en la preface qu' il a faite sur les livres de S. Augustin de la Cité de Dieu, par luy traduict, qu' il addresse au Roy Charles sixiesme, dit sur le subject qui s' offre telles paroles: Clovis premier Roy Chrestien combattant contre le Roy Dandat, qui estoit venu d' Allemagne aux parties de France & qui avoit mis & ordonné son siege à Conflans saincte Honorine, dont combien que la bataille commencee en la vallee, toutesfois fut-elle achevee en la montaigne, en laquelle est à present la tour de Mont-joye, & là fut pris premierement, & nommé vostre cry en armes c' est à sçavoir Mont-joye S. Denis. Ces paroles sont mal couchees, lesquelles je ne vous ay rapportees à autre fin, que pour monstrer que du temps de Charles sixiesme cecy estoit tenu pour familier en la bouche de nos Roys. Et au surplus que maistre Raoul le rapportoit au Roy Clovis, comme aussi font tous les autres. Vray que plusieurs sont en doute de l' occasion pour laquelle Clovis usa de ce mot Mont-joye: & semble aucunement que cest autheur le vueille attribuer à cette montagne, en laquelle il dit estre situee cette tour. Toutesfois quelques uns sont d' advis que Clovis ayant esté par plusieurs fois admonnesté de sa femme Clotilde de recevoir le S. Sacrement de Baptesme; finalement s' acheminant à la guerre qu' il eut contre les Allemans, il luy promist qu' en cas de bon succés de ses affaires, il accompliroit son vouloir. Parquoy se trouvant pendant le conflict & pesle mesle de la journee de Tolbiac en grand danger de sa personne, reclama soudainement le sainct grandement reveré en France, & que nous appellons nostre Apostre, qui est S. Denis, disant S. Denis mon Iouecomme s' il eust voulu dire, qu' en cas que S. Denis eust favorisé son entreprise, il l' eust de là en avant reveré comme son Jupiter (Ioue, Jove, Iovis, Jovis), que lors comme Ethnique il adoroit sur tous les autres Dieux: Et que depuis on avroit fait de Mon Jove, un Mont-joye comme par succession de temps il est aisé d' eschanger plus estrangement les paroles. Cettecy est l' opinion de Messire Robert Cenal Evesque d' Auranches en ses Perioques de la Gaule. Toutesfois si en cecy la divination est excusable, je croirois (si tant est toutesfois que Clovis ait esté premier autheur de cette parole) que si lors de cette necessité (qui fut certes l' une des plus grandes que courut jamais ce brave Roy) il invoqua l' aide de S. Denis, il usa du mot de Mont-joye sans aucun changement, comme s' il eust voulu dire que S. Denis estoit sa joye, son espoir, & consolation, & auquel il avoit toute sa fiance, usant toutesfois d' un article impropre de mon pour ma, ainsi que nous voyons les Allemans, Anglois, Escossois pratiquer assez souvent, lors qu' ils n' ont parfaite information de nostre Langue, comme il est à presumer qu' estoit Clovis, qui jamais n' avoit fait estat que des armes entre ses gend'armes François, la plus part desquels estoient extraicts du pays de la Germanie: Ainsi ayant esté mis ce mot en avant par Clovis, par le moyen duquel il pensa que ses affaires demy desesperees, luy reussiroient à bon effect: Les Roys qui de luy furent successeurs, s' attachans estroictément à cette parole, comme sacree & pleine de grand mystere, la mirent semblablement en œuvre, lors qu' ils se trouverent pressez en quelque rencontre de guerre, sans juger s' il falloit dire ma joye, plustost que mon-joye

viernes, 4 de agosto de 2023

8. 20. Assassin, Assassinat, Apannage, mots empruntez des Voyages d' Outre-mer.

Assassin, Assassinat, Apannage, mots empruntez des Voyages d' Outre-mer.

CHAPITRE XX.

En matiere d' Estat c' est une chose fort familiere, quand on se trouve le plus foible, de hazarder l' un de ses sujects contre le chef des ennemis pour le faire mourir, a fin de se garentir du danger où l' on estoit. Le Roy Porsenna au siege de Rome en eust peu dire quelque chose, quand Scevola, pour sauver sa ville, le pensa tuer, prit son Secretaire au lieu de luy. Ainsi fut meurdry le Roy Sigisbert à l' instigation de Fredegonde, lors que Chilperic son mary estoit par luy estroitement assiegé en la ville de Soissons, ou Cambray. Ainsi Amurath Roy des Turcs, dans sa chambre par un soldat qui faisoit semblant de luy vouloir baiser les mains: qui fut cause (dit Theodore Spadugin) que depuis il fut ordonné que les Gardes tiendroient les mains de tout homme qui viendroit salüer le grand Turc, pour obvier de là en avant à tel inconvenient. Et à peu dire, de nostre temps en cette façon fut occis François Duc de Guyse en l' an mil cinq cens soixante & un, par Poltrot devant Orleans: la mort duquel fit lever le siege, & tout d' une suite apporta la Paix par tout le Royaume. Cela s' est fait par des particuliers. Mais que tout un peuple par Loy ancienne du pays fust voüé à faire de tels meurdres, quand il en recevoit commandement par son Prince ou Superieur, je n' en trouve que deux manieres de gens, ceux qui de nostre jeune aage suivirent la secte des Anabaptistes soubs Jean Leïdan, & anciennement au Levant les Assaßins, subject de ce present chapitre. Celuy qui premier en introduisit l' usage fut un Seigneur, lequel lors de nos voyages d' outremer s' estant fortifié dans un Chasteau de tres-difficile accés, attiroit à sa suite plusieurs gens ramassez, ausquels il donnoit des brevuages pour les endormir d' un profond somme, & à leur resveil ils se trouvoient en une maison de plaisance, où ils estoient accueillis de toutes sortes de voluptez par personnes à ce atiltrees: Et apres avoir passé en cette façon quelques jours, finalement estans endormis par cette potion, puis resveillez on les presentoit à leur Prince, lequel s' informant d' eux de tout ce qu' ils avoient faict en dormant (car à vray dire ils estimoient que ce fust un Songe) il leur faisoit promesse d' un tel Paradis, là & au cas que pour la deffense de leur Religion ils voulussent entreprendre de tuer ceux des Chrestiens qui leur seroient par luy commandez: ce qu' ils sceurent fort bien exploicter, & depuis tels commandemens s' estendirent non seulement encontre les Chrestiens, mais aussi contre tous autres, ores qu' ils fussent Mahumetistes, ainsi qu' il sembloit bon à leur Roy. Chose à quoy ils se voüoyent d' un cœur si franc, & gay, que leur commun mauldisson estoit, Mauldy sois tu comme celuy qui s' arme de peur de mouri. Nicetas Senateur de Constantinople dit qu' ils portoient tel respect aux commandemens de leur Seigneur, que si seulement ils eussent descouvert à un clin d' œil, que sa volonté estoit qu' ils mourussent, ils se fussent precipitez du haut en bas d' une maison, & exposez au meillieu de cent espees, ou jectez au feu, ou dans l' eau, plustost qu' ils ne luy eussent obey: & qu' estans par luy deleguez pour tuer quelques Princes, ils se transportoient vers eux, comme leurs serviteurs, ou comme ayans à leur dire quelque chose à l' aureille pour  leur profit, & trouvans leur apoint, ils ne doutoient de les tuer, à la charge d' estre puis apres tuez. Vray que le passage est corrompu, les appellans Chaßins, au lieu d' Assaßins, tout ainsi qu' en un autre endroict vous trouverez Blachiens ceux qu' on disoit Valachiens. Guillaume de Nangy acquiesçant à cette opinion, dit que ce Roy des Assassins estoit non seulement redouté des Chrestiens, mais aussi des Sarrazins: Et parce que son passage fait grandement à mon intention, il me plaist de le vous transplanter icy tout au long. Ce tres-mauvais, & mal-veillant Seigneur de Assassins habitoit en la confinité & contree d' Antioche & de Damas en Chasteaux tresbien garnis sur montagnes: Celuy Roy estoit moult redouté & craint des Chrestiens, & des Sarrazins, Princes prochains, & lointains: pource que moult de fois eux par ses messagers indifferemment faisoit occire: car aucuns enfans commandoit de sa terre estre emmenez en ses Palais, & illec apprenoient toutes manieres de langue, & estoient enseignez d' aimer leurs Seigneurs sur toutes autres choses, & à luy jusques à la mort obeyr, qu' ainsi pourroient aux joyes de Paradis parvenir, & quiconque mouroit en obedience, estoit honoré au gré de la terre des Assassins: & ainsi à leur Roy obeyssans, moult de Princes occirent, comme ceux qui de leur mort avoient peu de crainte. 

Il dit vray: car par eux fut proditoirement mis à mort le Comte de Tripoly, & quelque temps apres Edoüart d' Angleterre, plus Thierry Prince de Tir. Philippe Auguste estant de retour de son voyage de Hierusalem, eut advis que le mesme Richard Anglois, avoit attitré quelques uns de ce peuple pour le meurdrir, qui le fit tenir sur ses gardes plus ententivement que de coustume. Sainct Louys en l' un de ses Voyages d' Outremer fut adverty qu' on luy vouloit dresser pareille embusche. Le tout de la mesme façon, que sur nos jeunes ans nous vismes un Jean Leïdan Prince des Anabaptistes, dont j' ay cy-dessus parlé, qui depescha douze de ses supposts pour tuer tous les Princes d' Allemagne, a fin de maintenir contr'eux sa Religion.

Tout de cette mesme façon les Jesuites ont introduit en leur Republique,  un nouveau formulaire d' Estat, non seulement contre ceux qui pretendent guerroyer leurs Roys, Comme contre le feu Prince d' Orenge, qu' ils firent assassiner dedans Anvers l' an mil cinq cens quatre vingts quatre par un Baltasard Girard, & encores contre le Prince Maurice son fils, l' an mil cinq cens quatre vingts dix-neuf, par Jean Parme: mais contre les Roys, & Roynes mesmes en & au dedans leurs Royaumes: Ainsi l' attenterent-ils par quatre fois contre la defuncte Royne Elisabeth d' Angleterre, par leur Jesuite Campian ou Campiense, l' an mil cinq cens septante huict. Par Guillaume Parry l' an mil cinq cens octante quatre à ce poussé & induict par Benedetto Palmio dedans la ville de Venise, & depuis confirmé dedans Paris, par Hannibal Coldreto: Par Patrice Culan 1588. persuadé par un meschant Jesuite nommé Holt. Et par Edoüard Squirre l' an mil cinq cens nonante sept par les inductions de leur Pere Richard Walpod. Ainsi deux fois contre nostre grand Roy Henry IIII. reduict sous l' obeyssance du sainct Siege de Rome, l' une en l' an mil cinq cens nonante trois par Pierre Barriere dit la Barre, dedans la ville de Melun, au beau milieu de la trefue, l' autre en celle de Paris l' an mil cinq cens nonante quatre par Jean Chastel dedans la Paix: celuy la mené à la main par les instructions & memoires de Varade & Commole Jesuites, & cestuy-cy nourry en leur escole dedans Paris: Ainsi l' ont-ils voulu de fraische memoire pratiquer, en l' an mil six cens cinq par leur Garnet contre Jacques Roy d' Angleterre, Escosse & Hibernie, c' est à dire la grande Bretagne. Et qui est une chose pleine de pitié & d' horreur tout ensemble: C' est que tout ainsi que le Prince des Assassins du Levant promettoit un Paradis asseuré à ceux qu' il mettoit en œuvre, là & au cas qu' ils mourussent sur cette querele, aussi font le semblable nos Jesuites à leurs champions, ausquels ils administrent premierement le Sainct Sacrement de penitence, puis celuy de communion, & armez de cette devotion leur laschent franchement la bride pour executer leurs detestables parricides. Institution impie, abhominable, & abhorrente de nostre Religion Chrestienne, mais grand artifice du Diable, pour les faire redouter, & consequemment quelquesfois embrasser par les Princes & grands Seigneurs, a fin de ne tomber en leurs aguets. Et qui est un malheur admirable, ce venin s' est espandu dedans quelques autres membres de nostre Eglise. Comme nous vismes par le malheureux parricide commis le deuxiesme jour d' Aoust mil cinq cens octante neuf en la personne de nostre bon Roy Henry troisiesme, à Sainct Cloud, par frere Jacques Clement Jacobin. Que Jean Mariana Jesuite a solemnizé comme chose tres-saincte au premier livre de son institution du Prince, chapitre sixiesme. Mais pour ne m' esloigner de mon but, combien que du commencement ces Assassins demeurassent en certaine contree, toutesfois ils furent depuis espandus en forme de secte par tout le Levant, ainsi que nous tesmoigne Jean Sire de Joinville, que les appelle Beduins: Mais il est certain que leur vray nom estoit d' Assassins, comme nous apprenons de Raphael Volaterran en sa Geographie, de Paule Aemile en ses Croniques de France, & de Guillaume Nangy par moy cy dessus allegué. Nicolas Gilles en ses Annales les appelle Arsacides d' un mot corrompu. Or d' eux est venu que la posterité tant en France, qu' en Italie: (car & François & Italiens entreprenoient d' ordinaire ensemblement tels voyages de Levant) appella Assassins ceux qui de sens froid, & guet apens faisoient des meurdres, & Assaßinats le mal qui en advenoit.

Au regard de l' Apanage, qui a exercité plusieurs esprits de la France, pour sçavoir dont il prenoit son origine: il est certain que tant sous la premiere que seconde lignee de nos Rois, mesmes bien avant sous la troisiesme, les Apannages estoient incogneus entre les enfans puisnez de la Couronne, tels que nous les observons aujourd'huy. Paul Aemile, autheur duquel je fais grand compte entre tous nos Historiographes, dit que Baudoüin Comte de Flandres, & Louys Comte de Blois s' estans croisez avec le Venitien, Baudoüin s' estant emparé de l' Empire de Constantinople, departit entre ses principaux Capitaines quelques Provinces, par forme de Panage. Nous y avons adjousté quelques formalitez tirees de nostre vieille Loy Salique.