Autre plant des Escoles de l' Université de Paris.
CHAPITRE XVII.
La discipline qui s' observa en ses pauvres Escoliers Boursiers qui estoient reclus, fut trouvee si bonne, que la plus part des peres & meres, envoyans leurs enfans à Paris pour estudier; les voulurent aussi loger dedans les Colleges pour eviter la desbauche: & cestuy est le septiesme mesnage de nostre Université. De là vint que les Colleges s' enflans d' Escoliers, on fut contraint d' y faire des Classes (mot dont Quintilian usa au premier Livre de ses Institutions Oratoires, au faict des jeunes Escoliers) & y avoir divers Precepteurs pour enseigner les enfans selon le plus ou le moins de leurs capacitez: Ceux-cy furent appellez Regens d' un mot emprunté du Concil general tenu dedans Rome en l' Eglise de sainct Jean de Latran sous le Pape Alexandre troisiesme. Où au Chapitre dix-huictiesme exhortant les Archevesques, & Evesques de nostre Eglise Gallicane (ainsi le trouverez vous en propres termes) on y adjouste.
Ut quicunque viri litterati voluerint regere studia litterarum, & caetera.
C' est à dire que les hommes doctes qui se voudroient regir & enseigner les bonnes lettres. De là nous avons non seulement appellez Regens ceux qui enseignoient la jeunesse en Humanité, & aux Arts: Mais aussi Docteurs Regens, en Decret, en Medecine, & aux Loix. Depuis cet ordre ainsi estably, parce que les Regens devoient estre passez Maistres és Arts, celuy auquel le fondateur du College avoit donné le nom de Maistre, pour avoir l' œil dessus tous ses Escoliers Boursiers, fut ores appellé Magister Paedagogus ores Principalis Paedagogus. Antiquité que vous recueillerez toute entiere d' un Article de la Reformation de Monsieur le Cardinal d' Estouteville sous le tiltre de Artistis. Item, Mandamus & praecipimus, ut quilibet Magister Paedagogus assumat sibi Regentes, & quoslibet submonitores, viros bonos, graves, & doctos, qui sint discipulis ad exemplum, & qui tales sint, ut pro merito suarum virtutum, & scientiae, revereantur à Scholaribus. Est enim metus, & reverentia nervus scholasticae disciplinae. Et ut tales apud se habeant, volumus eisdem Regentibus & submonitoribus, per Principales Paedagogos, de competenti salario, cum victu, provideri: Nec liceat quoquo modo Principali Paedagogo, aliquem in submonitorem accipere, à quo pensionem, vel quantamcumque summam pecuniae pro suo victu, cum labore docendi exigat, aut recipiat. Nec enim facilè est putandus idoneus, qui non suae industriae mercedem expetit, sed ipse sui laboris solvit usuram. Quod si quis reperiatur qui pro docendo, vel regendo quicquam dederit, à Regentia, & omni honore facultatis arceatur.
Je vous ay voulu representer le passage, non seulement en consideration des mots dont je parle: Mais beaucoup plus pour la prudence qui se trouve en cet article, & en quelque autre ensuivant: Item circa praedictos Paedagogos, & domorum Principales Ministros &c.
& tout d' une suite, Quia ex bonorum virorum relatione comperimus, nonnullos Magistros Regentes in Artium Facultate, ab antiquo more legendi, & regendi, &c. De tous lesquels passages vous apprenez que les Souverains des Colleges estoient appellez Magistri Paedagogi, aut Principales Paedagogi, & ceux qui sous eux enseignoient les enfans aux Classes, tantost Regentes, tantost Submonitores. Et comme le temps seul donne la vogue aux paroles, aussi est seulement demeuré le mot de Regent, & au principal gouverneur celuy de Principal seulement. Et ainsi que les affaires des Colleges vont, il y a trois sortes de Maistres: Le
superintendant de tous les autres que nous appellons Principal, les Regens qui enseignent aux Classes, & les autres qui sans faire lectures publiques tiennent chambres à loüage du Principal, que l' on nomme Pedagogues, parce qu' ils ont la charge & gouvernement sur quelques enfans de Maison. De ces Escoliers nous appellons pensionnaires ceux qui sont à la pension du Principal, & Cameristes les autres qui sont nourris par leurs Pedagogues. Outre ceux-là il y a encore des Escoliers qui demeurent en ville hors les Colleges, qui vont ouïr les leçons d' uns & autres Regens selon que l' opinion leur en prend, ou aux Maistres qui les gouvernent. Les jeunes appellez Martinets, par nous, & les autres du nom de Galoches. Recherche vrayement plus curieuse qu' utile; non toutesfois à negliger quand vous entendrez que cette police ne fut pas jettee en moule, ny tout d' un coup par l' Université, ains petit à petit jusques à nous. Bien vous diray-je qu' elle estoit en usage dés le temps du Roy Charles V. comme nous apprenons par les Statuts du College des Dormans fondé par son Chancelier, dont l' un des articles estoit tel. Que tous Escoliers forains pourront aller estudier en ce College, à la charge que chacun d' eux payera par chacun an la somme de 4. sols Parisis pour le profit & entretenement du College. Ny pour cela n' estoient lors, ny assez long temps apres discontinuees les leçons que l' on faisoit aux grandes Escoles de la ruë au Fouërre, singulierement en la Philosophie, pour y passer les Maistres és Arts. Mais comme les leçons en Humanité se fussent peu à peu plantees dedans les Colleges, aussi firent le semblable celles de la Philosophie. Chose dont le Cardinal d' Estouteville en la reformation de nostre Université se plaignoit comme je vous ay cy-dessus monstré: ne nous estant rien resté de cette longue ancienneté, sinon que l' on y donne encore le bonnet de Maistrise aux Arts. Qui estoit la closture ancienne de la Philosophie en laquelle on y avoit estudié.
Et est advenu en l' oeconomie de ces Colleges ce qui advient ordinairement aux Blancques, esquelles les Benefices ne tombent souvent aux gens de merite. Ainsi veirent nos predecesseurs des Colleges s' estre advantagez avec le temps en reputation, ores que leurs Statuts originaires fussent foibles, & les autres estre demeurez en friche, bien qu' ils fussent fondez en plusieurs beaux & notables Statuts. De quelle marque sont les Colleges de Laon, Maistre Gervais, S. Michel, Boissy, & entre ces quatre celuy de Maistre Gervais. Je vous ay dit que le College de Sorbonne, est le premier & plus ancien de tous, lequel commença d' ouvrir sa porte dés l' an 1253. & le dernier est celuy des Grassins fondé l' an 1569. par Maistre Pierre Grassin Conseiller au Parlement de Paris. Cela s' appelle trois cens seize ans de l' un à l' autre.
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